C’est par les réseaux sociaux que la triste nouvelle est tombée, laissant le monde du théâtre abasourdi. Puis quelques heures plus tard, le Syndicat National du Théâtre Privé, suivie de l’équipe de Théâtre Actuel qui officie maintenant à la tête du théâtre de la Bruyère qui lui fut si cher, ont officialisé l’annonce de sa disparition. Marguerite Gourgue est décédée au Vietnam, alors qu’elle naviguait sur le Mékong ! Presque comme dans un roman de Marguerite Duras.
L’amour du théâtre et des artistes
Toutes les deux avaient en commun le prénom, l’exil et les rondeurs. Marguerite Gourgue était une pied-noir d’Algérie. Elle n’était pas nostalgique, mais elle n’en demeurait pas moins attachée à ce passé. C’est pour cette raison qu’elle avait tenu à accueillir le spectacle de Xavier Lemaire et Pierre-Olivier Scotto, Là-bas, de l’autre côté de la mer. Elle était fière de donner la parole à cette période de notre histoire encore douloureuse.
Venue du cinéma, Marguerite Gourgue aimait passionnément le théâtre et surtout les artistes. Nous nous souviendrons tous de son extrême bienveillance et de sa gentillesse. Elle répondait très facilement aux demandes d’organiser des lectures, ce fameux passage obligé pour monter un spectacle.
« Marguerite aura marqué l’histoire du théâtre par ses choix audacieux et exigeants, permettant à de nombreux auteurs, metteurs en scène et artistes de mettre leurs spectacles en lumière », rappelle la nouvelle direction du La Bruyère. On se souviendra des spectacles passés sur sa scène, comme Les forains de Wojtowicz mis en scène par Panchika Velez, Kiki Van Beethoven d’Éric-Emannuel Schmitt, avec Danièle Lebrun mise en scène par Christophe Lidon. Mais également de Suite Française et Tempête en juin de Némirovsky ou encore de son dernier spectacle programmé, The Normal Heart de Larry Kramer… On ne peut pas tous les citer… Mais elle les aura tous défendus avec la même force.
Une femme attentive et généreuse
Certains, comme Les 39 marches, adapté par Éric Métayer, On ne se mentira jamais d’Éric Assous, Les Cavaliers de Kessel et Éric Bouvron, Chance ! d’Hervé Devolder, ont été récompensés par des Molières. Ajoutant ainsi dans la vitrine de son théâtre, déjà très fournie, la fameuse statuette. Même si elle avait quitté la direction de son théâtre, elle continuait à accompagner des spectacles, avec d’autres producteurs comme Christophe Segura et Jean-Claude Lande. Elle savait recevoir. On se souviendra de la somptueuse fête qu’elle avait organisée avec Thomas Le Douarec pour les cent ans de René de Obaldia, de son sourire timide lorsqu’elle nous accueillait les soirs de générales. Nos conversations vont nous manquer. On pense aujourd’hui à Isabelle, à sa famille, à ses proches et à tous ceux qui ont eu la joie de la côtoyer. Au revoir, Madame, et merci pour tout.