Après Les Faux British et Le gros diamant du Prince Ludwig, Gwen Aduh continue d’importer d’Outre-Manche les comédies délirantes signées par le trio Henry Lewis, Jonathan Sayer et Henry Shields, pour notre plus grand plaisir. Et comme on ne change pas une équipe qui gagne, c’est en s’associant de nouveau à sa complice Miren Pradier qu’il adapte une troisième œuvre de ces doux dingues, Sacré Pan.
Une grandiose débâcle
Cet artiste perché, descendu tout droit de la planète Pluton (petite référence à un de ses seuls-en-scène), est tombé tout petit dans la marmite d’une soupe mitonnée par Les Branquignoles de Robert Dhéry, Le Hellzapoppin’ de H.C. Potter, et toutes les œuvres de Pierre Dac. Résultat, ses spectacles sont à la croisée de leurs univers aussi loufoque que déjanté. Préparez vos mouchoirs, vous allez pleurer de rire !
La mise en abîme est souvent la meilleure des machineries théâtrales pour égayer le spectateur. Si en plus on y met en scène des amateurs tentant de faire aussi bien que les professionnels, le procédé va rouler comme sur des roulettes. Rien de tel qu’une succession de catastrophes pour faire s’esclaffer une salle.
Une pièce chorale
Tous les ans, la chorale des Troubadours de l’Évangile présente un spectacle. Cette fois-ci, ses membres ont décidé de faire quelque chose de colossal, une comédie musicale à l’américaine. Ce sera Peter Pan ! Tous se sont mobilisés, certes avec leurs bonnes volontés, mais pas forcément avec leurs talents ! Ils ont pensé à tout, aux différents décors et nombreux effets visuels et trucages exigés par la pièce. Ils avaient rêvé en grand. Rien n’allant se passer comme prévu, le cauchemar peut commencer.
Même si, en fil rouge, nous suivons bien l’histoire de Peter Pan, le reste du spectacle étant inénarrable, nous n’allons rien raconter du tout. Sachez que ces drôles de paroissiens, composés du Père Benoît et de ses ouailles — sœur Bernadette, Marie, Tanguy, Lorenzo, Thomas, Antoine, Michel, Luc (le pompier de service), Edouard (le pianiste) — vont avec fougue enchaîner les bévues, les cafouillages, les disputes, les maladresses, les déconvenues, les trous de mémoires et même de chutes spectaculaires.
Pour que l’engrenage du mécanisme roule, il faut une mise en scène réglée avec la précision d’une horlogerie. Gwen Aduh est un orfèvre en la matière. Le rouage est huilé à la perfection. La production n’ayant lésiné sur aucun moyen, dont une scène tournante, la magie scénique opère. Les décors de Michel Mugnier et du Collectif Titanos sont impressionnants, surtout lorsqu’ils se démantèlent. Sous des airs de faux cheap, les costumes d’Aurélie de Cazanove ne sont pas tristes du tout !
Pour incarner avec subtilité l’inexpérience, il faut des artistes chevronnés. La fameuse vis comica ne fonctionne que si les personnages demeurent sincères dans toutes leurs intentions, même les plus malhabiles. Xavier Martin, Aurélie de Cazanove, Romane Tsacanias, Nikko Dogz, Alain Dumas, Benoît Facerias, Blaise Le Boulanger, Jean-Marie Lecoq, Renaud Castel et Djahîz Gil maîtrisent à merveille le sens de la situation, du comique et du rythme. Ils nous conduisent sans encombre au pays de l’imaginaire, où il fait si bon de rire.
Marie-Céline Nivière
Sacré Pan d’Henry Lewis, Jonathan Sayer et Henry Shields.
Théâtre des Variétés
7 boulevard Montmartre
75002 Paris.
Jusqu’au 14 avril 2024
Durée 1h30.
Adaptation de Gwen Aduh et Miren Pradier
Mise en scène de Gwen Aduh
Avec Renaud Castel, Aurélie de Cazanove, Nikko Dogz, Alain Dumas, Benoît Facerias, Djahîz Gil (en alternance avec Simon Froget-Legendre), Balise Le Boulanger, Jean-Marie Lecoq, Xavier Martin, Romane Tsacanias et la voix de Marthe Villalonga
Décors de Michel Mugnier et Collectif Titanos
Costumes d’Aurélie de Cazanove
Lumières de Clément Giovannetti
Musique de Christophe Arnulf