Qu’est-ce qui vous a donné envie d’imaginer un spectacle autour des rencontres humaines ?
Julien Lestel : Tout simplement parce que c’est ce qui nous lie les uns aux autres, qui façonne nos vies, qui nous construit et nous constitue au fil du temps. C’est un sujet qui me passionne car il est instinctif, émotionnel et fondamental. Pour aller à la rencontre de l’autre, on est obligé de sortir de soi, de se dépasser, de découvrir ce qu’il a en dehors de notre sphère intime. Tout cela m’a donné envie d’écrire une pièce sur ce thème.
De quel ordre sont ces rencontres ?
Julien Lestel : Elles parlent essentiellement d’amour, de passion, de couple, car rencontrer l’autre, c’est aussi rencontrer son âme. C’est quelque chose d’extrêmement fort. Cela peut être à la fois doux, fusionnel, physique ou violent. À travers ce spectacle, j’ai eu envie d’imaginer, de rêver toutes les rencontres possibles, des hommes entre eux, des femmes, mais aussi des trios et des quatuors. C’était important pour moi de dépasser les normes établies, de montrer au plus grand nombre que tout est possible, que la différence est aussi une force. C’est comme un acte politique, surtout en ces périodes de repli. Mon but n’est nullement de provoquer mais de faire réfléchir, de montrer comme la passion est belle quels que soient les protagonistes. La rencontre c’est à la fois le moment T, mais aussi les répercussions qu’elles ont sur nos vies. Certaines sont bienveillantes, heureuses, d’autres toxiques, voire nocives. J’ai eu envie d’explorer tout cela au cours des différents tableaux qui composent le spectacle.
Quand a été créé le ballet ?
Julien Lestel : Il y a un an environ. C’était en avril 2023 à Colombes. Ce qui a permet de roder le spectacle, d’en peaufiner les détails. On arrive Salle Pleyel chargé à bloc et riche déjà de rencontres avec le public. C’est important pour une œuvre vivante de se confronter au regard des spectateurs pour s’affiner et enfin exprimer tout ce qu’elle recèle de poésie. Et puis au fil des représentations les complicités ont grandi, les interprètes se sont sentis plus libres entre eux. Les gestes sont plus fluides. La danse n’est plus réfléchie comme au tout début, elle est maintenant intuitive.
Sur quelles musiques vous êtes-vous appuyés pour votre chorégraphie ?
Julien Lestel : J’ai principalement utilisé des morceaux d’un compositeur italien, que j’aime beaucoup, Ezio Bosso. Il y a dans son écriture musicale quelque chose de doux, d’envoûtant qui correspond à ce que je cherchais. Et puis certaines des partitions que j’ai choisies, ont été écrites alors qu’il se savait condamné. Elles portent en elle une urgence de vivre, une force qui donne envie de profiter du moment présent. Elle évoque autant la fragilité de nos existences que toute la beauté, l’énergie qu’elles renferment. Et puis pour le final, je voulais quelque chose de sobre et de captivant à la fois, qui ouvre sur tout ce que les rencontres vécues au plateau ont pu offrir aux différents protagonistes. J’ai donc opté pour une chanson de Chet Baker, Alone Together. L’ambiance est très jazzy. C’est tout à fait ce que je recherchais.
Comment avez-vous travaillé les rencontres au plateau avec vos danseurs ?
Julien Lestel : À partir d’images que j’ai dans la tête, mais aussi d’improvisations que me proposent les interprètes. Dans un premier temps, j’ai choisi les couples et les groupes. Puis, je leur ai donné quelques indications et leur ai transmis des gestes, des tempos. Et enfin je les ai laissés libre de s’emparer de tout cela, de se les approprier pour que leur émotion transparaisse dans leur mouvement. C’est important que le danseur ou la danseuse puisse s’exprimer, que sa personnalité soit visible dans la chorégraphie. Cela donne plus d’authenticité.
Comment s’est fait le choix des interprètes ?
Julien Lestel : sur les douze personnes, dix font partie de la compagnie. Les deux autres sont des amis de longue date, que j’ai connu à l’Opéra de Paris, Alexandra Cardinale et Gilles Porte. Je trouvais intéressant que plusieurs générations d’individus soient présentes au plateau. L’humain grandit, change et vieillit. Au fil de sa vie, les rencontres sont différentes. Car c’est ça la vie.
Propos recueillis par Olivier Frégaville-Gratian d’Amore
Rencontres de Julien Lestel
Création 2023
Salle Pleyel
225 rue du Faubourg Saint-Honoré
75008 Paris
Le 1er février à 20h
durée 1h
Tournée
30 janvier 2024 au Théâtre de Chartres
3 février 2024 au Casino Barrière – Lille
10 février 2024 au Casino Barrière – Bordeaux
17 mars 2024 au Palais des congrès – Le Touquet
28 avril 2024 au Casino Barrière – Toulouse
Chorégraphie de Julien Lestel assisté de Gilles Porte
Musiques d’Ezio Bosso et Chet Baker
Lumières de Lo Ammy Vaimatapako / Costumes : BJL
Avec les danseurs du Ballet Julien Lestel – Eva Bégué, Titouan Bongini, Alexandra Cardinale, Florent Cazeneuve, Maxence Chippaux, Jean-Baptiste de Gimel, Roxane Katrun, Ingrid Le Breton, Inès Pagotto, Louis Plazer, Gilles Porte, Mara Whittington