Aux Célestins – Théâtre de Lyon, Céline Fuhrer et Jean-Luc Vincent, transfuges des Chiens de Navarre, imaginent un futur masculiniste et sexiste, où seule la femme soumise et silencieuse a droit de cité. Pour les combattantes et les passionarias de la cause féministe, les femmes qui refusent d’être réduites à la partie congrue de l’humanité, pas d’autre choix que de vivre sous terre, cachées dans un réseau de souterrains et d’égouts plutôt malodorants. Reprenant les grandes figures du féminisme, Françoise (Dolto), Simone (de Beauvoir), Delphine (Seyrig) et Ava (possiblement Gardner), quatre comédien.ne.s (Céline Fuhrer, Valérie Karsenti, Cédric Moreau et Jean-Luc Vincent) préparent leur revanche, un coup d’éclat qui devrait remettre les pendules à l’heure et renvoyer tous les agresseurs sexuels et les farouches défenseurs du patriarcat, devenus piliers d’un régime dictatorial, aux oubliettes de l’histoire.
Voilà, une idée qu’elle est bonne… Épinglant violeurs, pédophiles et autres individus du même acabit, qui sans honte, sans vergogne, continuent à faire la une des médias, Céline Fuhrer et Jean-Luc Vincent déchaînent avec une certaine faconde leur plume trempée au vitriol. Mais à trop vouloir enfoncer des portes ouvertes, à vouloir faire rire à tout prix, les deux artistes se prennent les pieds dans le tapis d’un féminisme, qui vaut un peu mieux que ses répliques à l’emporte-pièce – certaines tirées in extenso de Papy fait de la résistance – , ses gags à gros traits, cette succession de saynètes qui s’enchainent à marche forcées, ces bons mots à peu de frais. On aurait tant aimé défendre ce projet, n’en retenir que le loufoque, le grinçant, l’hilarant, faire front derrière un spectacle émancipateur, frondeur et inquiétant, tant il dit des dérives actuelles de nos sociétés occidentales, où comme l’avait malheureusement prédit l’autrice du Deuxième sexe, « les droits des femmes sont remis en question. »
Sur le fil, le jeu des comédiens et comédiennes emporte des rires. Valérie Karsenti en tête, est impayable dans sa danse du clito. Les autres ne sont pas en reste. Quelques savoureuses scènes d’anthologie sauvent cette dystopie du désastre. L’enfer est pavé de bonnes intentions. La femme n’existe plus en est le parfaite exemple. Quel gâchis !
Olivier Frégaville-Gratian d’Amore – envoyé spécial à Lyon
La femme n’existe plus de Céline Fuhrer et Jean-Luc Vincent
création le 8 novembre 2023 à Châteauvallon-Liberté – Scène nationale de Toulon
La Célestine
Les Célestins – Théâtre de Lyon
4 rue Charles Dullin
jusqu’au 26 novembre 2023
durée 1h30
Tournée
29 novembre au 1er décembre 2023 au Moulin du Roc, scène nationale / Niort (79)
6 au 31 décembre 2023 au théâtre du Rond-point / Paris (75)
12 janvier 2024 au Théâtre Châtillon-Clamart (92)
18 janvier 2024 au Théâtre des 2 Rives / Charenton-le-Pont (94)
26 janvier 2024 au Beffroi / Montrouge (92)
22 — 23 février 2024 au Théâtre du Bois de l’Aune / Aix-en-Provence (13)
Avec Céline Fuhrer, Valérie Karsenti, Cédric Moreau, Jean-Luc Vincent
Scénographie de François Gauthier-Lafaye
costumes d’Élisabeth Cerqueira
son et régie générale d’Isabelle Fuchs
lumière de Ludovic Bouaud
musique de Christophe Rodomisto
construction de Flavien Renaudon
régie plateau – Jessica Maneveau