Emmanuel Vérité © Vincent Arbelet

Emmanuel Vérité, comédien céleste aux pays du théâtre

Rencontre avec le comédien Emmanuel Vérité, à l'occasion de la reprise au Lucernaire, de son excellent spectacle "Tout Dostoïevski".

Emmanuel Vérité © DR

À l’occasion de la reprise au Lucernaire de Tout Dostoïevski, spectacle qu’il a co-écrit avec Benoît Lambert, le directeur de La Comédie de Saint-Étienne, avec lequel il collabore depuis de nombreuses années, nous avons demandé à Emmanuel Vérité de répondre à notre questionnaire.

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Quel est votre premier souvenir d’art vivant ?
Si j’en crois ma mémoire, mon premier souvenir de spectateur est une pièce avec Jean Lefebvre, que j’ai vu en Tunisie avec mes parents. C’était je crois Le canard à l’orange, pièce de boulevard. Le théâtre de Tunis est un beau théâtre à l’italienne. C’est un théâtre dans lequel je répétais avec la troupe de mon collège. J’ai un souvenir très précis de l’odeur de bois, des fauteuils rouges usés, de l’ambiance très belle et très mélancolique de ce vieux théâtre. Jean Lefebvre faisait un immense numéro de cabotinage dans la pure tradition du boulevard : faux fous rires de ses partenaires, apartés au public pour se moquer des camarades en scène et enfin la fameuse recette du canard à l’orange…

Emmanuel Vérité - Tout Dostoievski @ Gilles Vidal
Tout Dostoievski @ Gilles Vidal

Quel a été le déclencheur qui vous a donné envie d’embrasser une carrière dans le secteur de l’art vivant ?
C’est le cinéma qui m’a donné envie de faire du théâtre… C’est dans une école de théâtre qu’on apprend le métier… Je voulais faire du cinéma et patatras, j’ai rencontré le théâtre. Le cinéma revient très fort dans mes projets aujourd’hui.

Qu’est ce qui a fait que vous avez choisi d’être comédien ?
C’est un film, plutôt mauvais d’ailleurs, Jésus de Nazareth de Zeffirelli, qui est, au départ, une mini-série télé. Mes grands-parents et mes parents en avaient beaucoup parlé à table et nous avions vu les épisodes à la télé. J’ai un souvenir très précis du visage de l’enfant qui jouait Jésus jeune… J’avais le même âge, c’était rigolo de se dire qu’on pouvait devenir comédien même en étant enfant… Et puis après on rencontre des professeurs qui vous donnent envie de continuer et surtout vous emmènent sur d’autres chemins que celui du film de Zeffirelli !

Le premier spectacle auquel vous avez participé et quel souvenir en retenez-vous ?
C’était un spectacle dans le petit village où nous habitions en Alsace. Nous avions joué dans la cour de récréation devant les parents. J’interprétais le rôle d’un bègue qui s’appelait « Mitraillette » ! Les gens avaient rigolé en entendant ce pauvre « Mitraillette » essayer de finir ses phrases.

Emmanuel Vérité - L'avare - Benoit Lambert © Antoine Franchet
L’avare de Molière, mise en scène de Benoît Lambert © Antoine Franchet

Votre plus grand coup de cœur scénique ?
Il y en a eu plein, et à chaque fois à des moments charnières de la vie. Arlequin valet de deux maîtres de Goldoni mis en scène par Giorgio Strehler. Quelqu’un va venir de Jon Fosse, mis en scène par Claude Regy. Les frères Karamazov de Dostoïevski, mis en scène de Sylvain Creuzevault. En fait, il y en a plein d’autres. Je suis assez bon public, sauf quand j’ai la sensation qu’on se fout de ma gueule…

Quelles sont vos plus belles rencontres ?
Les rencontres ce sont les profs. Je leur dois beaucoup et à beaucoup. J’ai gardé avec mes profs des liens très forts. Leurs présences, leurs pensées, leurs conseils, leurs livres… La raison de ce lien est essentiellement due à une chose très puissante, c’est que notre métier en France est un métier de tradition orale. Il n’y a pas comme en Angleterre ou en Russie d’école avec une MÉTHODE. Chaque actrice et chaque comédien en France apprennent son art en mélangeant les enseignements… C’est beau, c’est essentiel même, cette tradition orale. Pierre Debauche, qui est un professeur qui m’a énormément marqué (fondateur du théâtre des Amandiers de Nanterre et professeur au CNSAD pendant dix ans), disait : « Il faudrait une école par élève ».

En quoi votre métier est essentiel à votre équilibre ?
Je n’en sais absolument rien… Désolé.

Qu’est-ce qui vous inspire ?
La musique surtout, et la poésie… Mais c’est pareil en fait. Deux arts où la raison n’est pas utile. Rien à comprendre, juste à sentir !

Emmanuel Vérité © Mathilde Delahaye
Charlie tenant bien en main les oeuvres de Dostoïevski © Mathile Delahaye

De quel ordre est votre rapport à la scène ?
Le rapport à la scène est physique. C’est l’espace qui guide. L’espace c’est l’élément dans lequel tout se dessine et s’entend. Ce sont Pierre Debauche et Robert Angebaud qui m’ont transmis ce rapport à l’espace. C’est notre matière première pour travailler, le reste découle de l’espace. C’est de là que nous venons ? Non ? … 😉

À quel endroit de votre chair, de votre corps situez-vous votre désir de faire votre métier ?
Dans les jambes… Ça démange…

Avec quels autres artistes aimeriez-vous travailler ?
Sylvain Creuzevault.

À quel projet fou aimeriez-vous participer ?
Un tournage de film dans la forêt amazonienne, genre Aguirre ou la colère des dieux, ou Fitzgerraldo.

Si votre vie était une œuvre, quelle serait-elle ?
Un film de Lubitsch, Sérénade à trois ou de Billy Wilder, genre Sunset Boulevard.

Propos recueillis par Marie-Céline Nivière

Tout Dostoïevski de Benoît Lambert et Emmanuel Vérité
(pour lire l’article sur le spectacle cliquez ici)
Lucernaire
53, rue Notre-Dame-des champs
75006 Paris.
Du 11 octobre au 26 novembre 2023.
Du mardi au samedi à A9h, dimanche 15h30.
Durée 1h05

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