Jusqu’au 21 octobre 2023, à Théâtre Ouvert, Théo Askolovitch explore, avec malice, humour et sensibilité, la reconstruction des liens familiaux après la mort soudaine d’un des piliers du foyer, la mère. Une pièce à découvrir sans modération !
© Christophe Raynaud de Lage
Sur un plateau blanc, vide, un jeune homme et une jeune femme se placent face public. D’un bonjour, ils interpellent les spectateurs, brisent le quatrième mur et les font entrer dans la danse, celle de la vie, de la mort et du deuil. Ils étaient enfants quand, un vendredi, leur mère est entrée à l’hôpital pour une opération bénigne. Le destin en a décidé autrement, une complication. À peine le temps d’aller la voir, de lui dire au revoir qu’elle n’est plus.
Le deuil, un processus intime
Continuant à plonger dans ses souvenirs, à porter au plateau sa propre histoire, Théo Askolovitch impose depuis 66 jours, où il racontait du diagnostic à la rémission son cancer, un style vivant, vibrant, drôle diablement efficace. Revenant sur la mort de sa mère, survenue alors qu’il était adolescent, il retrace les grandes lignes du retour à la vie, à une forme de légèreté, d’insouciance et de bonheur. Bien sûr, l’absente, son spectre, est partout dans les colères, les rires, les grandes engueulades. Mais petit à petit, elle n’est plus un poids, une entrave.
Avec beaucoup d’humour, il met en scène son père, sa sœur et lui-même. Il n’hésite pas à exagérer les traits, à frôler la caricature, sans jamais y céder. Créant ainsi une bulle burlesque, absolument savoureuse, où, si les rires fusent, les larmes et une forme de mélancolie affleurent, le jeune artiste parle surtout d’amour, de tendresse, de cette vie qui irrigue le quotidien, qui alimente les liens familiaux, avec ses hauts, ses bas, ses disputes et ses « rabibochages ». C’est beau, touchant, troublant. On se laisse emporter par ce souffle où chacun rejoue le passé, le commente, s’arrange avec sa propre vérité, dans le seul but de se retrouver, de s’aimer encore et toujours, et de ne surtout jamais oublier Zoé, la femme, la mère, celle qui est partie trop tôt.
Il n’y a pas d’amour heureux
Reprenant les mots d’Aragon, ceux que chantait Danièle Darrieux dans Huit Femmes d’Ozon, Théo Askolovitch passe du spleen, de la nostalgie du passé, à l’avenir, voilé mais plus radieux. Entraînant ses deux comédiens (détonante Marilou Aussilloux et survolté Serge Avédikian) dans le tourbillon de la vie, il signe un spectacle délicat autant qu’hilarant, follement décalé et définitivement humain.
Avec Zoé [et maintenant les vivants], deuxième pièce qu’il écrit et met en scène, le jeune artiste confirme un certain talent pour rendre extraordinaire le banal et une manière bien à lui de manier avec doigté l’auto-dérision. Plein d’humilité et fort d’une sincérité mordante, Théo Askolovitch est clairement un artiste à suivre, sa nouvelle création à découvrir au plus vite !
Olivier Frégaville-Gratian d’Amore
Zoé [et maintenant les vivants] de Théo Askolovitch
Théâtre ouvert
159 Avenue Gambetta
75020 Paris
Texte et mise en scène de Théo Askolovitch
paru aux Éditions esse que
Collaboration artistique – Marilou Aussilloux
Avec Théo Askolovitch, Marilou Aussilloux, Serge Avédikian
Assistant à la mise en scène – Flavien Beaudron
Créateur son – Samuel Chabert
Créateur lumières – Nicolas Bordes
Création vidéo – Jules Bonnel, Robinson Guillermet
Costumes de Juliette Chambaud
Stagiaire à la mise en scène – Mathilde Ngasi