Dans l’immense navire noir qu’est l’Opéra de Lyon après la restructuration imaginée par Jean Nouvel en 1993, un vrombissement, un souffle presque mécanique rompt le silence. Au loin, en fond de scène, dans un rayon de lumière diffuse, une silhouette apparaît. Ondulante, vêtue de vêtements amples, sombres, moirés – comme ceux déjà imaginés par Angelo Mantis, dans Larsen C, précédente création de Christos Papadopoulos, elle semble glisser sur le sol, prendre lentement possession de l’espace. Rejointe par un être semblable, puis par toute un groupe de créatures de la même espèce d’hominidés ayant la capacité de flotter au ras du sol, elle se met au diapason, entre en résonnance avec cet ensemble de corps ondoyants au rythme des rondements et des pulsations sonores.
S’inspirant de la nature, que ce soit des bancs de poissons pour Ion en 2018 ou des icebergs dérivant dans les océans pour Larsen C en 2022, le chorégraphe grec poursuit avec Mycelium, sa nouvelle pièce créée spécialement pour le corps de Ballet de l’Opéra de Lyon, son travail autour de la manière dont le vivant interagit avec son environnement. S’intéressant cette fois aux relations entre les filaments qui composent la partie végétative et souterraine des champignons, il signe une œuvre lancinante autant qu’hypnotique, qui conjugue habilement individualité et communion des êtres.
Créée dans le cadre de la XXe édition de la Biennale de la danse et programmée en décembre 2024 au Théâtre de la Ville,Mycelium esquisse une partition très itérative, dont se dégage parfois un mouvement autre, entrainant un danseur ou une poignée de danseurs hors du groupe compact. L’effet est sidérant de beauté, mais suffit-il à emporter ? Rien n’est moins sûr, surtout sur la durée. Pourtant, il faut le reconnaître, porté par une troupe virtuose, la musique enveloppante du compositeur électro Coti K, les clairs-obscurs envoutants d’Eliza Alexandropoulou et l’écriture précise et souple de Christos Papadopoulos, l’objet chorégraphique touche à la grâce. Parfaitement millimétrée et chronométrée, la partition, tout en déliés et déhanchements, est une gourmandise qui se déguste avec une infinie délicatesse !
Olivier Frégaville-Gratian d’Amore – Envoyé spécial à Lyon
Mycélium de Christos Papadopoulos
Création pour le Ballet de l’Opéra de Lyon dans le cadre de la Biennale de la Danse
Pièce pour 20 interprètes
Opéra de Lyon
1 place de la Comédie,
69001 Lyon
Jusqu’au 14 septembre 2023
Durée 1h
Tournée
Les 22 et 23 septembre, Théâtre de Liège (Belgique)
Du 17 au 22 décembre 2024, au Théâtre de la Ville, Paris 1er
Chorégraphie de Christos Papadopoulos Assisté de Georgios Kotsifakis
Musique de Coti K
Lumières d’Eliza Alexandropoulou
Costumes d’Angelos Mendis
Maîtres de ballet – Pierre Advokatoff, Jocelyne Mocogni, Amandine Roque de la Cruz