Joan Mompart © Francesca Palazzi
Genève le 4 juillet 2019, Joan Mompart, séance portrait. © Francesca Palazzi

Joan Mompart, magicien de l’art vivant 

D'Avignon, où il a présenté "Oz", à Genève, où il dirige depuis 2021 le théâtre Am Stram Gram, Joan Mompart crée une magie théâtrale.

Joan Mompart © Francesca Palazzi

Présent cet été à Avignon pour présenter sa nouvelle création Oz, une adaptation du Magicien d’Oz de Lyman Frank Baum par Robert Sandoz, le comédien et metteur en scène d’origine catalane, né à Lausanne, a pris la tête en 2021 du Théâtre Am Stram Gram, lieu pluridisciplinaire et transgénérationnel de Genève. Avant de présenter la saison 23-24, le 28 août prochain, Joan Mompart a accepté de se prêter au jeu des surexpositions. 

© Francesca Palazzi

Quel est votre premier souvenir d’art vivant ? 
Les Correfocs qui sont les diables qui se promènent dans les rues de Barcelone à la Saint-Jean (San Joan) avec des feux d’artifices dans leurs traînes… C’est de là que des équipes comme Els Comediants ou La Fura dels Baus, que j’ai découvert plus tard, sont nées.

Quel a été le déclencheur qui vous a donné envie d’embrasser une carrière dans le secteur de l’art vivant ? 
Je m’étais essayé à la peinture et un tableau fait à quatre mains avec un ami a été déterminant. Le tableau s’appelait Le Théâtre, il se trouve que la partie peinte par l’ami était superbe alors que ma partie était… disons moins réussie. Cela m’a définitivement orienté vers le théâtre, j’étais qui plus est, plutôt en demande d’une pratique artistique de groupe. En allant au théâtre voir une pièce jeune public ça a été la révélation… j’avais le désir d’être sur le plateau. Je regardais aussi les documents INA des grands artistes en interviews et travaillais les imitations de J.L. Borges, Salvador Dali, Louis-Ferdinand Céline…

OZ - mise en scène Joan Mompart © Ariane Catton
© Ariane Catton

Qu’est-ce qui a fait que vous avez choisi d’être comédien, metteur en scène et directeur de théâtre ? 
Je pense que c’est l’envie de travailler à l’éphémère de manière très engagée, de pratiquer l’art en groupe, de cultiver l’inhabituel, le chemin de traverse. Je suis devenu comédien, car c’est un art vivant où rien n’est jamais acquis, posé, fixe… Chaque représentation, chaque jour de répétition est un nouveau défi. Je suis devenu metteur en scène, car j’avais envie de dire encore d’autres choses que celles que je pouvais dire dans les propositions où je ne dirigeais pas… Et directeur de théâtre pour la relation si riche avec les artistes ; pour chercher, dans un dialogue par les arts, une manière nouvelle, plus horizontale, d’envisager la relation entre adultes, enfance et jeunesse.

Quel est Le premier spectacle auquel vous avez participé et quel souvenir en retenez-vous ? 
Le premier était L’Éveil du printemps de F. Wedekind. Je jouais Jeannot Rilow, à l’Acte II (scène 3 !) L’adolescent invoque la figure de Desdémone, transfigurée tour à tour sous les traits de Psyché, Io, Galatée, l’Amour, Ada, Léda, Lorelei… la mise en scène proposait un voyage dans des peintures et des œuvres dont l’adolescent conservait pieusement des copies dans un coffre d’enfant et sur lequel il projetait ses fantasmes.

Votre plus grand coup de cœur scénique ? 
L’Île des Esclaves de Giorgio Strehler, le rôle de Cléanthis (miraculeuse comédienne qui débordait d’humanité). « Ubu Roi », par le Teatro Malandro d’Omar Porras (une pièce de rue à la joie décomplexée, l’énergie d’une équipe). La Fura dels Baus… Alain Platel au festival des Amériques à Montréal.

Quelles sont vos plus belles rencontres ?
Celles que je n’ai pas encore faites… Je suis plein de gratitude et d’amitié pour celles et ceux avec qui je partage, ou avec qui j’ai pu partager la route. Je me considère chanceux et suis rempli d’admiration pour beaucoup des personnes que j’ai pu croiser en Suisse, en France, en Espagne ou dans l’océan Indien où j’ai travaillé quelques années. C’est souvent dans les tournées hors d’Europe, au contact d’artistes venant de partout, que j’ai pu saisir à quel point l’art vivant, le théâtre, est vaste. Aujourd’hui, c’est la rencontre avec les artistes émergent·es qui me parait très belle, il y a beaucoup à apprendre de ces démarches nouvelles qui renouvellent sans cesse l’art vivant.

En quoi votre métier est essentiel à votre équilibre ? 
Le théâtre est, en beaucoup de points, semblable à la vie. Par sa pratique, en collaboration avec les autres vers un objectif commun, j’apprends encore et toujours la patience, le soin de l’autre qui passe aussi par une exigence réciproque. J’aime être en équipe, cela m’équilibre effectivement. 

Oz - mise en scène Joan Mompart © Ariane Catton
© Ariane Catton

Qu’est-ce qui vous inspire ? 
L’enfance et la jeunesse. Ces générations-là m’inspirent et me motivent de manière essentielle.

De quel ordre est votre rapport à la scène ? 
La scène de théâtre devrait à mon sens être comprise comme si elle se trouvait dans la rue, comme si elle faisait physiquement partie de la vie quotidienne des gens et, en même temps, être un endroit sacré, qui grâce aux comédien·nes et aux technicien·nes est capable d’une magie qui transcende le rapport au monde. La scène est un endroit de lucidité, de clairvoyance et de divination.

À quel endroit de votre chair, de votre corps, situez-vous votre désir de faire votre métier ? 
Plexus solaire et plante des pieds.

Avec quels autres artistes aimeriez-vous travailler ? 
La liste est longue… Et il y a aussi des gens dont je n’ai pas même encore entendu parler.

À quel projet fou aimeriez-vous participer ? 
Rendre les rues de Genève à la nature avec une végétation luxuriante et inviter les Genevois·es à y jouer à cache-cache. 

Si votre vie était une œuvre, quelle serait-elle ?
J’aimerais que ce soit The NeverEnding story.

Propos recueillis par Olivier Frégaville-Gratian d’Amore

Théâtre Am Stram Gram
Rte de Frontenex 56
1207 Genève, Suisse

Oz de Robert Sandoz, librement inspiré de The Wonderful Wizard of Oz de Lyman Frank Baum
Mise en scène de Joan Bompart
Festival Off Avignon – Le 11 • Avignon.
11 bd Raspail 84000 Avignon.
Du 7 au 26 juillet 2023 à 10h, relâche les 13 et 20 juillet.
Durée 1h.
À partir de 7 ans.

Tournée :
8 avril 2024, Grrranit · Scène Nationale de Belfort.
11 et 12 avril 2024, Les Scènes du Jura – Scène nationale.
21 et 22 avril 2024, Théâtre du Passage (Neuchâtel, CH).
28 et 29 avril 2024, Théâtre Victor-Hugo de Bagneux.

1 Comment

  1. J’ai eu la chance de voir la magnifique représentation du Magicien d’Oz et je l’a trouvé absolument remarquable. Comme un sublime poème, elle rempli l’âme de beauté et d’espoir. L’œuvre représentée reflète clairement l’engagement culturel, social et humanitaire de Joan Mompart. Genève a de la chance de compter un directeur de théâtre d’une telle qualité!

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