Soyons honnêtes, je ne savais pas, en dehors du nom, qui était Fatema Mernissi. Rien de tel qu’un bon spectacle pour combler le puit de l’ignorance. Cette universitaire, sociologue, autrice, née en 1940 et morte en 2015, est une féministe marocaine qui a mis « la lumière sur la capacité des femmes à négocier leur place au sein de la société ». Lorsque l’on dit toutes les femmes, cela comprend l’Orientale et l’Occidentale. Je suis tombé sous le charme de ses mots, de ses réflexions, de cette pensée limpide, qui ouvre les portes de tous les harems, les véridiques comme les métaphoriques.
Pour concevoir ce spectacle Fatema Mernissi / Harems, Anne-Laure Liégeois s’est plongé dans toutes l’œuvre de cette grande dame. De cette matière, elle en a tiré un texte de toute beauté sur la condition des femmes. Il y a d’abord, celle des Marocaines souvent soumises au diktat des croyances populaires et aux lois patriarcales. À travers les histoires de ces femmes enfermées dans leur « harem domestique », privées de liberté mais pas privées de penser, on reçoit en miroir le reflet de nos propres entraves. Celles que cette société patriarcale nous impose insidieusement. Au détour d’un mot, d’une idée, d’une image, notre esprit se détache parfois du texte pour aller titiller notre mémoire et gratter notre perception du monde.
Anne-Laure Liégeois a eu l’excellent parti pris de la parole contée. Assis autour d’une table, telle Shéhérazade des Mille et une nuits, Amal Ayouch et Sanae Assif nous embarquent dans leurs récits. Quelles merveilleuses comédiennes ! Elles s’approprient avec tellement d’aisance la parole de Fatema Mernissi, que l’on croirait presque que ce sont leurs propres histoires qu’elles nous racontent. Et c’est bien normal, car cette parole et celle de toutes les femmes ! C’est magnifique.
Marie-Céline Nivière
Fatema Mernissi / Harems, d’après les écrits de Fatema Mernissi
Festival Off Avignon – La Manufacture
2 bis rue des Écoles 84000 Avignon.
Du 7 au 24 juillet 2023 à 13h, relâche les 12 et 19 juillet.
Durée 1h.
Texte, dramaturgie, conception, scénographie et mise en scène d’Anne-Laure Liégeois.
Avec Amal Ayouch et Sanae Assif.
Collaboration à la dramaturgie d’Asmaa Houri et Amal Ayouch.
Collaboration à la direction d’actrices Olivier Dutilloy.
Lumière de Guillaume Tesson.
Je n’ai pas encore vu la pièce mais je connais le talent et travail d’Amal Ayouche.
Votre critique exprime exactement mes pensées à-propos de la femme Marocanne que j’ai la chance de frequenter depuis que nous sommes tombés amoureuse de Fes il y a 18 ans et que nous avons acheté aveuglement un Riad dans l’ancienne Medina. Un havre de paix et d’inspiration.
La femme Marocainne est belle, intelligente et souvent beaucoup plus a l’aise dans sa tête et dans son corps que beaucoup de nous occidentales… supposées liberées.
Juste en lisant votre critique, j’ai hate de voir la piece. Merci et bravo.