La comédienne d’origine portugaise, au caractère bien trempé, dans Camus Casarès, une géographie amoureuse, incarne la grande tragédienne Maria Casarès, femme libre et déterminée , qui vit le bonheur et le malheur avec la même intensité. Sensible, émouvante, Teresa Ovidio a répondu sans filtre à notre questionnaire.
© Mohamed Khalil
Quel est votre premier souvenir d’art vivant ?
Mes parents ! Le cirque à Lisbonne, je ne me souviens plus du nom. Je faisais de la danse acrobatique et rêvais de représenter le Portugal aux Jeux Olympiques.
Quel a été le déclencheur qui vous a donné envie d’embrasser une carrière dans le secteur de l’art vivant ?
Peter Pan, c’était mon meilleur ami ! Il venait me visiter tous les soirs et on volait ensemble. Je le racontais à mes sœurs et frère, ils me croyaient, suivaient mes aventures, tous les objets autour de moi étaient des êtres vivants.
Qu’est ce qui a fait que vous avez choisi d’être comédienne ?
C’est comme me demander : qu’est qui vous a fait aimer l’amour ? C’est une histoire d’amour. C’est le métier qui m’a choisi, ou moi, lui. C’est l’œuf qui fait la poule ou la poule qui fait l’œuf ?
Le premier spectacle auquel vous avez participé et quel souvenir en retenez-vous ?
Ay Carmela de José Sanchis Sinisterra, avec Jean Marie Galey, mise en scène par Pierre Chabert. Ce n’est pas un souvenir, c’est le présent tous les jours, une aventure exceptionnelle, jouée plus de mille fois.
Votre plus grand coup de cœur scénique ?
Ay Carmela, toujours. Mais toutes les pièces que j’ai jouées ont été pour moi des coups de cœur, autant Guy Rétoré avec Le sexe de la femme comme Champ de Bataille de Matei Visniec au TEP, que Pierre Palmade avec 13 à Table de Marc-Gilbert Sauvageon au Théâtre Saint Georges… Et la rencontre merveilleuse de Wajdi Mouawad.
Quelles sont vos plus belles rencontres ?
Mon compagnon et mon fils.
En quoi votre métier est essentiel à votre équilibre ?
En quoi le monde, et tout ce qui l’entoure, est essentiel à mon équilibre ? L’eau, la paix et l’amour.
Qu’est-ce qui vous inspire ?
La vie, les gens dans leur quotidien, les voyages, les livres — je lis beaucoup, surtout des romans, des biographies, anglo-saxons, portugais, français, espagnols. De grands poètes dans leur langue, comme Pessoa, Rilke, T.S. Elliot, Robert Frost, Shakespeare… Je regarde et écoute les gens vivre. Ils m’amusent, m’inspirent, me dégoûtent, bref, la comédie humaine. Et la mer.
De quel ordre est votre rapport à la scène ?
Sans public il n’y a pas de scène, le public c’est ma scène, c’est le partage qui est important, all the world’s a stage.
À quel endroit de votre chair, de votre corps situez-vous votre désir de faire votre métier ?
Dans l’endroit le plus secret de moi-même.
Avec quels autres artistes aimeriez-vous travailler ?
Ce n’est pas un secret de dire que ce métier est constitué d’autant de familles et de clivages, de disparités, d’absence d’intérêt et de manque d’empathie les uns pour les autres, à l’image de l’insoluble relation entre le théâtre privé et le théâtre public. J’aimerais travailler avec des tas d’artistes, mais mission impossible… Oui je peux dire Ostermeier, Wadji Mouawad, Krystian Lupa, Richard Eyre, David Hare, Gena Rollands, Ken Loach, François Ozon, Jacques Audiard…
À quel projet fou aimeriez-vous participer ?
Je suis contre la bienséance, des projets dans lesquels je ne suis plus objet mais responsable de mon projet. Être maître de moi-même en tant qu’actrice, pas #bankable, mais #talentsansdiscrimination.
Si votre vie était une œuvre, quelle serait-elle ?
Un éternel devenir !
Propos recueillis par Marie-Céline Nivière
Camus Casarès, une géographie amoureuse
d’après la correspondance d’Albert Camus et Maria Casarès 1944-1959
Festival Off Avignon – La Scala-Provence
3 rue Pourquery de Boisserin 84000 Avignon.
Du 7 au 29 juillet 2023 à 18h30, relâche les lundis.
Durée 1h20.