À Avignon, aux Hivernales, dans le cadre d’On (y) danse aussi l’été !, le danseur et acrobate s’associe au chorégraphe et conteur Michel Schweizer pour présenter une œuvre à quatre mains, Nice trip. Questionnant la notion de frontière, de barrière, le duo imagine un spectacle hybride qui joue autant des contrastes de leur corps — l’un musculeux, l’autre longiligne — que de leur rapport à la langue et aux mots.

© Milan Szypura

Quel est votre premier souvenir d’art vivant ?
Ma grand-mère maternelle faisait partie d’une troupe de théâtre amateur, le T.R.A.C., dans laquelle elle s’investissait beaucoup — ça lui prenait beaucoup de temps, se rappelle le vieil enfant. La voir au plateau doit faire partie de mes premiers souvenirs de scène. Et je pense aussi aux spectacles organisés à Noël par l’office d’HLM où travaillait mon père. Ça se déroulait à la MJC du quartier Champfleury qui allait devenir, en tout petit, mon laboratoire de vie.

Quel a été le déclencheur qui vous a donné envie d’embrasser une carrière dans le secteur de l’art vivant ?
Un peu de ce que je viens de dire plus haut, je crois… Le goût d’une marge à découvrir loin de mon entourage. Aller à un endroit dont personne autour de moi n’était jamais revenu. Un espace dont on peut dire, avec mystère : ceci est mon métier.

Qu’est-ce qui a fait que vous avez choisi d’être danseur, acrobate et chorégraphe ?
Je ne me considère ni comme l’un ni comme l’autre, mais les déclarations Pôle emploi continuent de refuser le terme « gigoteur ».

Le premier spectacle auquel vous avez participé et quel souvenir en retenez-vous ?
Spectacle d’école de CE2, je crois, une adaptation ambitieuse de… quelque chose, en rapport avec les échecs, puisque c’est ce que racontaient nos costumes de papier crépons. Je jouais le roi blanc, et il s’avère que la reine blanche… Mais c’est sans doute sans rapport…

Votre plus grand coup de cœur scénique – une pièce, une équipe, une personne, plusieurs personnes ?
Un souvenir important dans ma mythologie intime : C’est pour toi que je fais ça de Guy Alloucherie, spectacle imaginé pour les étudiants sortant du centre national des arts du cirque (Cnac). Le spectacle est programmé dans le In d’Avignon et puisque la culture, c’est pour tous, C’est extra-muros à côté de la MJC,où je passais tout mon temps, qu’il est donné. Je monte et démonte le chapiteau, c’est mon travail d’été. À cette occasion, je découvre que le Cnac offre des casquettes, des sacs banane et des pin’s. J’en déduit donc que ce doit être une institution respectable. Quelques mois plus tard, je fais partie des effectifs.

Quelles sont vos plus belles rencontres ?
Marie, Lou et Sam.

En quoi votre métier est essentiel à votre équilibre ?
Partir souvent, essayer de gérer la question du retour, s’installer dans une certaine idée de l’impermanence, aller de petits débuts en grandes fins pour reconnaître que la continuité, la durée, c’est une accumulation d’arrêts. Et donc de départs tout autant. Tout en étant vigilant à la gestion des ulcères.

Qu’est-ce qui vous inspire ?
Ça dépend. Mais c’est souvent le reste.

De quel ordre est votre rapport à la scène ?
Contradictoire et ambigu.

À quel endroit de votre chair, de votre corps, situez-vous votre désir de faire votre métier ?
Mes entorses, mes discopathies et, de façon plus territorialisée, mes mains et mon dos.

Olivier Frégaville-Gratian d’Amore

Nice trip de Mathieu Desseigne-Ravel et Michel Schweizer
Festival Off Avignon 
On (y)danse aussi l’été ! – Les Hivernales-CDCN
L’Atelier (La manutention)
4 rue des Escalier Sainte Anne
84000 Avignon.
Du 10 au 20 juillet à 17h20, relâche le 15 juillet.
Durée 1h15.