Marina Gomes © Samuel Cuetto

Marina Gomes, la danse au service de la cité

Aux Hivernales, dans le cadre du OFF d'Avignon, Marina Gomes présente "Asmanti [Midi-Minuit]", un spectacle hybride entre théâtre et danse.

Marina Gomes © Samuel Cuetto

Aux Hivernales, dans le cadre du OFF d’Avignon, après avoir enchanté le public du Festival de Marseille, la chorégraphe et hip-hopeuse présente Asmanti [Midi-Minuit], un spectacle hybride entre théâtre et danse. À la manière d’un long plan séquence, Marina Gomes invite à plonger dans le quotidien d’une cité. Une belle révélation !

© Samuel Cuetto

Quel est votre premier souvenir d’art vivant ?
Quand j’étais enfant, c’était un spectacle des grandes de mon école de danse, sur les femmes dans la mythologie grecque.

Quel a été le déclencheur qui vous a donné envie d’embrasser une carrière dans le secteur de l’art vivant ?
Depuis petite, je rêvais d’être danseuse, depuis mes premiers cours de danse dans une petite école du secteur avec une prof extraordinaire, mais dans ma famille, danseuse « c’est pas un métier ». C’est après 8 ans d’études universitaires, un travail de psychologue en parallèle de projets de danse, que j’ai tout plaqué, je suis partie vivre en Colombie et c’est la rencontre avec une jeune chorégraphe de là bas, qui me ressemble beaucoup, devenue une soeur,c’est avec Ingrid Londono, que j’ai compris que j’avais les épaules assez solide pour porter mes envies de créations.

'Asmanti - Bach Nord de Marina Gomes © Pierre Gondard
Marina Gomes dans Bach Nord © Pierre Gondard

Qu’est-ce qui a fait que vous avez choisi d’être danseuse et chorégraphe ?
Je sais pas si j’ai vraiment choisi, cela a été un processus, l’inscription à la danse quand j’étais petite et c’est devenu le moyen par lequel je peux raconter des choses, cela aurait pu être l’écriture ou le rap. Peut-être la réalisation de film aussi si je savais tenir une caméra. La danse, c’est un moyen, celui que j’ai eu entre les mains.

Le premier spectacle auquel vous avez participé et quel souvenir en retenez-vous ? 
Mon gala de danse à 5 ans, j’en retiens un émerveillement et une grande fierté. Enfant, la danse m’a donné de la confiance, de la force et la certitude qu’un jour, j’en ferais quelque chose.

Votre plus grand coup de cour scénique ?
C’est une question difficile pour moi. Déjà ma culture de l’art vivant est limité, c’est le cinéma qui m’a bercé beaucoup plus que la scène. Et si justement, j’ai eu cette envie de porter mes projets, c’est parce que je me reconnais peu dans ce que j’ai pu voir sur scène. Mon coup de cour, c’est la danse dans la rue, le hip-hop, le rap au sein des MJC, des salles de training, voir cet art qui nous appartient de grandir et nous faire grandir.

Quelles sont vos plus belles rencontres ?
Celles de mes frères, amis, de Medellin en Colombie, qui font de l’art, principalement du rap, un moyen de pacification des quartiers et de lutte contre les assassinats. Ils m’ont montré à quel point l’art peut avoir du sens, à quel point il est nécessaire qu’on s’organise, qu’on s’engage et qu’on mette nos forces au service du soin, de l’émancipation, de la valorisation de nos histoires.

'Asmanti de Marina Gomes © Pierre Gondard
‘Asmanti de Marina Gomes © Pierre Gondard

En quoi votre métier est essentiel à votre équilibre ?
Il ne l’est pas. Ma famille, mes gens, ils sont essentiels.

Qu’est-ce qui vous inspire ?
J’aurais envie de répondre par une phrase d’un rappeur, Luciano « ce qui m’inspire, c’est que mes yeux ont filmés », ce que je mets dans mes spectacles, c’est des images, des moments, des sensations que j’ai vus et vécus. Et pour la manière de les mettre au plateau, c’est le cinéma qui m’inspire, la photographie de l’image, les plans, les personnages, le rythme. Et aussi beaucoup le rap, il y a des phrases imprimées dans ma tête comme celle de Salif « la cité me serre si fort que j’ai l’impression de l’aimer » ou celle de Akhenaton « L’inclinaison de ma tête est une réponse directe à l’inclinaison de mon cœur. »

De quel ordre est votre rapport à la scène ?
Je la vois comme un endroit de rencontre, une croisée des mondes. Mais je l’aime autant quand elle est dans un théâtre, que dehors quand on l’emmène au quartier et qu’on danse au pied des tours. La scène ça doit être : un concept, un moment, pas un lieu physique.

À quel endroit de votre chair, de votre corps, situez-vous votre désir de faire votre métier ?
Souvent, je fais le signe du 3 : la tête, le cœur et la main. Penser, aimer et faire. Mais s’il faut en choisir une, je dirai la main, le poing fermé, pour l’action, pour l’engagement, pour le combat.

Avec quels autres artistes aimeriez-vous travailler ?
Mon rêve ultime Martin Scorsese, d’ailleurs pour rire dans mon quartier, on m’appelle Scortreize, mais globalement le monde du cinéma regorge de gens avec qui j’aimerais travailler.

Bach Nord de Marina Gomes © Pierre Gondard

À quel projet fou aimeriez-vous participer ?
Ahahaha le mien ! La trilogie ‘Asmanti, Bach Nord, La Cuenta, C’est pour ça que je la fais, parce que si on arrive, ce sera fou, et encore plus fou que cela puisse avoir lieu à la fois dans la street et sur des grandes scènes, imagine nos têtes, l’ambiance de la cité à Chaillot, complètement fou.

Si votre vie était, une œuvre, quelle serait-elle ?
C’est difficile de savoir sans connaître la fin, j’ai l’impression d’être qu’au premier acte-là !
Pour sourire, j’ai envie de répondre que ce serai l’album Bande organisée de Jul, parce qu’au début personne ne croyait en lui, qu’il a réunit des gens qu’on pensait inréunissable, qu’il a donné à Marseille et ses talents une visibilité incroyable et qu’il a partagé à part égale tous les bénéfices entre les artistes (politiquement, c’est inspirant).

Propos recueillis par Olivier Frégaville-Gratian d’Amore

Asmanti [Midi-Minuit] de Marina Gomes
Festival OFF d’Avignon
Les Hivernales – CDCN d’Avignon
18, rue Guillaume Puy
84000 Avignon
du 10 au 20 juillet 2023 à 13h15
durée 30 min

En coréalisation avec la Mairie des 15-16e arrondissements de Marseille
Direction artistique, chorégraphie de Marina Gomes
Assistant chorégraphie – Elias Ardoin
Assistant théâtre – Jordan Rezgui
avec Ayaba Ardoin, Maelo Hernandez, Marina Gomes, Yanice Djae, Andreas Maanli
Création musicale d’Arsène Magnard
Création lumière de Paul Coissac

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