La couleur des souvenirs de Fabio Marra © Hélène Bozzi

Le nouveau spectacle de Fabio Marra va conquérir Avignon

Fabio Marra présente au Festival Off d'Avignon, dans le bel écrin du théâtre des Halles, son nouveau spectacle, La couleur des souvenirs.

La couleur des souvenirs de Fabio Marra © Hélène Bozzi

Fabio Marra est un coutumier du Off d’Avignon. À l’instar des néoréalistes italiens au cinéma, l’auteur et metteur en scène d’origine napolitaine a créé sa propre forme théâtrale. Sa nouvelle pièce, La couleur des souvenirs, menée par Dominique Pinon et Catherine Arditi, est un petit bijou.

© Hélène Bozzi

C’est au Centre culturel Michel Polnareff, situé au cœur de la Brie, à Fontenay-Trésigny, que nous avons découvert ce spectacle. C’était la première représentation devant le public. La peinture était toute fraîche ! À part deux trois problèmes techniques, résolus de main de maître par les régisseurs durant la représentation du spectacle, tout était en place. Dès le début et jusqu’à la fin, jamais notre attention n’a baissé la garde. Comme avec Teresina, La Naïve, Dans les chaussures d’un autre, Ensemble et Un pas après l’autre, Fabio Marra nous a pris par la main et nous ne l’avons jamais lâchée.

Si cette œuvre diffère des précédentes par sa structure, elle n’en demeure pas si éloignée. Il y est toujours question d’héritage familial, de rejet, de solitude, de la difficulté à se dire les choses. Ses personnages sont des gens ordinaires auquel on ne prête pas souvent attention. Ils sont tous les descendants du Voleur de bicyclette de Vittorio De Sica. Par leur aspiration à tenter de vivre et même de survivre dans une société, où ils n’ont pas toujours leur place, et dans une famille qui compose comme elle peut, ces héros nous touchent au cœur.

Un faux air de vérité
La couleur des souvenirs © Hélène Bozzi
© Hélène Bozzi

Cette fois-ci, il est question d’un peintre. Vittorio est un génie mais il n’a jamais pu l’admettre. Depuis, des années, il se cache derrière les autres, les grands maîtres, dont il copie le style. Ce n’est pas un faussaire ! Il crée une œuvre qui n’a jamais existé et qu’un filou (excellent Aurélien Chaussade) revend comme étant une trouvaille inédite chez un particulier. Dans son petit atelier, il bricole avec talent des peintures aussi vrai que nature. Atteint d’une hypertension oculaire, la cécité le gagne. Cet ours mal léché, enfermé dans son univers, va devoir régler ses propres conflits, se préparer à vivre différemment et à accepter l’amour des siens. Surtout, il va réaliser son chef-d’œuvre !

Une distribution d’une grande humanité

Jouant sur les différents registres que demande son personnage, comme la bougonnerie, l’égoïsme, la mauvaise foi, Dominique Pinon est exceptionnel. Il fait entendre à merveille les blessures d’un homme qui porte en lui la culpabilité de ne pas avoir sauvé sa mère. Magnifique fantôme, incarnée par la délicieuse Sonia Palau.

La couleur des souvenirs © Hélène Bozzi
© Hélène Bozzi

Après Ensemble, Un pas vers l’autre, c’est la troisième fois que Catherine Arditi joue dans une pièce de Fabio Marra. Il existe entre eux une belle osmose. Elle incarne à la perfection la sœur de Vittorio. Depuis des années, cette femme a perdu tout contact avec son frère et en souffre. Il est son unique et dernier lien avec son enfance. L’âge venant, elle a besoin de retrouver cette complicité perdue. C’est une « dame » qui a bien réussi dans la vie. Une bourgeoise qui n’a jamais oublié d’où elle venait. Elle dirige tout d’une main de fer et ne laisse pas souvent de place aux autres. Ce n’est pas sa fille (épatante Floriane Vincent) qui va nous contredire. Devant la maladie de son frère, elle décide, malgré son refus, de le prendre chez elle.

Et puis, il y a le fils rejeté. Un être fragile, naïf et touchant. Ce personnage, récurrent dans son œuvre, est toujours interprété par l’auteur. Fabio Marra y excelle car, comme je l’ai toujours dit, il y a du Pierre Étaix en lui. Il est remarquable dans ce registre qui demande une belle sincérité. Son ultime cadeau à son père est bouleversant.

Un écrin brillant

Cette nouvelle production séduit également par la beauté de la mise en scène. C’est du grand et du beau spectacle. La scénographie est d’une grande réussite, avec une admirable utilisation des projections vidéo. Elles sont autant décoratives que poétiques. Les trois espaces principaux, l’atelier de Vittorio, l’appartement de Clara et la galerie, mais également le restaurant et l’aéroport, prennent forme judicieusement. Quant aux costumes, toujours soignés, ils contribuent à cette atmosphère particulière qui règne dans les pièces de Marra. Laissez-vous emporter par cette Couleur des souvenirs.

Marie-Céline Nivière

La couleur des souvenirs, texte et mise en scène de Fabio Marra.
Festival Off AvignonThéâtre des Halles
22 rue du Roi René
84000 Avignon.

Du 7 au 26 juillet 2023 à 21h30, relâche les jeudis.
Durée 1h30.

Avec Dominique Pinon, Catherine Arditi, Fabio Marra, Sonia Palau, Floriane Vincent, Aurélien Chaussade.
Scénographie d’Audrey Vuong.
Costumes d’Alice Touvet.
Lumière de Kelig Le Bars.
Vidéo d’Italo Scialdone, Denis Parrot, Antonio Carola, Jean Ledieu et Guillaume Glad.
Musiques deClaudio del Vecchio.
Création sonore de François Galarneau.
Régie générale de Pierre Mille.
Accessoires de Dimitri Lenin.
Tableaux de Pasquale Mascoli et Alexander Fadeev.

Teaser de La Couleur du Temps de Fabio Marra au Théâtre des Halles d’Avignon © Fabio Marra

3 Comments

  1. Des bons acteurs, un décor mouvant assez intéressant mais trop grand et une fin un peu rapide. J’ai apprécié mais sans plus.

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