Après avoir abordé les joies de l’open space et les douleurs du monde du travail dans T-Rex, Alexandre Oppecini s’attaque au couple, à ce mystère de la rencontre et de l’union. Il signe ainsi une comédie romantique, qui a tout d’un scénario pour un bon téléfilm. 1961 : le beau Jean-Claude Pascal gagne l’Eurovision avec sa chanson Nous les amoureux. Un magnifique pied de nez à la bien-pensance de l’époque, car ces deux tourtereaux qu’on empêche de vivre heureux, bien que jamais cités, sont deux hommes. La chanson a illustré le spot publicitaire du gouvernement pour sa campagne contre l’homophobie. Et si les temps ont changé, qu’il n’est plus choquant de voir deux hommes se tenir main dans la main dans les rues, que le mariage pour tous existe enfin, la bêtise de certains demeure…
La pièce démarre sur Manu (Nathanaël Maïni) allongé sur ce qui pourrait être son lit. Mais un bip se fait entendre. Paul (Fabien Mara) apparaît. A coup de flashbacks, le jeune homme raconte leur histoire. Tout les opposait, sauf leur homosexualité. Paul est volage, léger et se noie dans la fête. Il y a comme une peur de vieillir dans sa course aux plaisirs. Manu est plus posé. Ce Corse a fui son île natale pour tenter de s’assumer. Loin du milieu, il cherche dans sa relation à l’autre une forme de sécurité. L’un ne croît pas au grand amour et au couple, l’autre est fortement attaché à la vision hétéronormée de la vie à deux. Lentement, imperceptiblement, chacun va s’apprivoiser et entamer ce qu’on nomme, une belle histoire d’amour. Et ces « cons » qui leurs tombent dessus, un soir, dans la rue, pour en tabasser un et humilier l’autre, vont être le ciment de leur union.
Les deux comédiens incarnent avec une belle sensibilité les différentes facettes de leurs personnages. On pourrait reprocher à l’auteur, qui signe également la mise en scène, de n’avoir pas toujours su éviter les lieux communs. Mais peut être était-ce un passage obligé pour faire entendre cette love story 2.0 entamée sur Grindr et poursuivie dans le monde réel. Il faudra passer par les plans culs et le sexe débridé des débuts pour que l’histoire s’installe, plus universelle qu’il n’y paraît. Les spectateurs ont répondu présent et la petite salle du Marais, pleine à craquer, frémis de leur émotion qu’ils laissent exploser dans leurs applaudissements plus que chaleureux.
Marie-Céline Nivière
Main dans la main, texte et mise en scène de Alexandre Oppecini.
Théâtre du Marais
37, rue Volta
75003 Paris.
Jusqu’au 27 juin 2023.
Les lundis et mardis à 19h30.
Durée 1h10.
Avec Nathanaël Maïni et Fabien Ara.
