Pit de Bobbi-Jene Smith et Or Schraiber © Yonathan Kellerman

Pit, ballet en quête de sens

Au Palais Garnier, avec «Pit», le duo Bobbi Jene Smith-Or Schraiber met entre ombre et lumière le corps de Ballet de l'Opéra de Paris.

Pit de Bobbi-Jene Smith et Or Schraiber © Yonathan Kellerman
© Yonathan Kellerman

Invités par Aurélie Dupont à créer une œuvre pour le Ballet de l’Opéra de Paris, Bobbi Jene Smith et Or Schraiber, le couple de chorégraphes formé à la Batsheva, imaginent avec Pit (anglais pour « fosse »), une pièce en clair-obscur pour vingt danseurs du corps de ballet. 

Le rideau s’ouvre, dévoilant un décor sépulcral dans les tons gris. Accentuées par des lumières spectrales, l’ambiance est sombre. Côté jardin, un petit groupe de personnes, habillé somptueusement en Alaïa by Pieter Mulier, en noir et blanc de pied en cap, est assis devant une immense estrade nue. Bouffant toute une partie de la scène, l’objet surréaliste offre une mise en abîme de l’art vivant et invite à un jeu de miroirs où les interprètes sont tour à tous, témoins et voyeurs, spectateurs et acteurs. Côté cour, instrument à la main, debout, le premier violon solo de l’orchestre de l’Opéra national de Paris, Petteri Iivonen se mêle aux danseuses et danseurs et emporte salle et scène, en jouant le concerto pour violon en ré mineur op. 47 du compositeur finlandais Jean Sibelius, dans une sorte de rêve ouaté où s’entremêle part d’ombre et de lumière d’une humanité piégée dans ses contradictions émotionnelles, dans ses désirs inassouvis. C’est déjà dire et interpréter beaucoup, tant la partition ciselée par le duo de chorégraphes manque d’un argument, d’une dramaturgie intelligible. 

Nourris à l’œuvre de Martha Graham et d’Ohad Naharin, dont ils ont été longtemps les disciples, mais aussi à celle de Pina Bausch, dont l’ombre tutélaire plane en filigrane sur certaines séquences évocatrices, Bobbi Jene Smith et Or Schraiber signent une pièce plus théâtrale que dansée. Fragile sur la forme, le geste abscons des deux artistes est au demeurant sublimé par des interprètes au sommet de leur art. Porté par un corps de ballet virtuose, Pit laisse sur sa faim mais aura imprimé dans nos mémoires de belles images et quelques unissons puissants, pleins d’une grâce viscérale, qui sauvent cette bien étrange soirée. 

Olivier Frégaville-Gratian d’Amore 

Pit de Bobbi Jene Smith et Or Schraiber
Palais Garnier
Opéra de Paris
Place de l’Opéra
75009 Paris
jusqu’au 30 mars 2023
durée 1h10

Chorégraphie de Bobbi Jene Smith et Or Schraiber 
dramaturgie de Jonathan Fredickson
Musique de Jean Sibelius (1865-1957) jouée au violon par Petteri Iivonen
musique de Celeste Oram (1990) dirigée par Joana Carneiro
Avec les danseurs du corps de ballet – Clémence Gross, Caroline Osmont, Juliette Hilaire, Laurène Lévy, Marion Gautier de Charnacé, Awa Joannais, Héloïse Jocqueviel, Alexandre Gasse, Jack Gasztowtt, Axel Ibot, Adrien Couvez, Yvon Demol, Mikaël Lafon, Maxime Thomas, Hugo Vigliotti, Takeru Coste, Théo Ghilbert, Julien Guillemard, Loup Marcault-Derouard & Antonin Monié 
Décors de Christian Friedländer 
Costumes d’ALAÏA by Pieter Mulier 
Lumières de John Torres 

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