À Arradon, au Théâtre de la Lucarne, seconde salle des Scènes du Golfe, Ghislaine Gouby a donné, le 27 mars 2023, un coup d’envoi musical et poétique à la sixième édition du festival vannetais dédié aux écritures, à la musique, et à bien d’autres libertés. En consacrant cette première soirée à deux grands auteurs de le chanson française, Anne Sylvestre et Georges Moustaki, la directrice du lieu a souhaité rappeler Ô combien les mots drôlement engagés de l’une, les paroles tendrement révolutionnaires de l’autre, illuminés nos quotidiens moroses.
Dans un savoureux tête-à-tête avec le journaliste Alexandre Fillon, l’ancienne critique musique du Monde, Véronique Mortaigne évoque celle qui fut, non une amie, comme elle aime à le répéter, mais une complice de vie, de ronchonnement. De son enfance lyonnaise à son décès en novembre 2020, peu de temps après avoir donné son dernier concert, ici, à Vannes, lors de la quatrième édition des Émancipéés, Anne Sylvestre a toujours cultivé une forme de discrétion sur sa vie et un engagement pour de justes causes. Icône féministe pour les uns et les unes, militante de toujours, combattante pour l’égalité pour les autres, la chanteuse et poétesse a su imposer un style, une voix, un art de la rime drôle et riche. Connue surtout pour ses « fabulettes » qui ont enchantées plusieurs générations d’enfants, l’artiste aux cheveux roux, qui aimait compartimenter sa vie, a aussi écrit pour les Gens qui doutent, pour les adultes rêvant de liberté et d’un monde plus juste. Un moment suspendu, où derrière les mots pleins de respect, de connivence, s’esquisse le portrait d’une femme, qui malgré les blessures de la vie, à toujours su rester libre.
La soirée continue. La salle est comble. Cyril Mokaiesh porte à la scène les chansons de son prochain album à paraître, un hommage lumineux à Georges Moustaki et donne à Arradon, la première date de son tour de chant. Amoureux de la chanson française, il retrace avec humour et ingéniosité la vie de celui qui se définissait comme un métèque, un juif errant, un pâtre grec, de sa naissance à Alexandrie en passant par ses amours avec Piaf et Barbara. Il habite les mots de l’auteur de Milord, de Ma Liberté, de La Philosophie, Ma solitude, Sans la nommer ou de La Dame brune, les fait vibrer pour qu’on les entende avec une belle clarté. Telles des caresses, les paroles de Moustaki, qu’elles soient révoltées, aimantes ou engagées, se posent sur nos âmes, donnent du baume au cœur et nous emportent dans un univers plein de légèreté et d’humanité. Sans le trahir et avec beaucoup de délicatesse, le chanteur d’origine libanaiseréarrange les morceaux, leur donne un petit coup de jeune et nous emporte dans ce beau voyage à travers la poésie de ce compositeur et auteur dont on avait presque oublié l’élégance et la générosité. Dans le bel écrin imaginé par Pascale Baehrel, Mokaiesh irradie la scène et offre à Moustaki une nouvelle éternité.
Olivier Frégaville-Gratian d’Amore – Envoyé spécial à Vannes
Les Émancipéés
Sixième Édition
Les Scènes du Golfe
Rencontre avec Véronique Mortaigne autour de son livre, Une Vie en vrai sur Anne Sylvestre
Mokaiesh chante Moustaki
avec Cyril Mokaiesh, Hugo Céchosz à la contrebasse/basse, Seb Hoog à la guitare Flo Savigny à la batterie
Mise en scène de Pascale Baehrel