Expérience avignonnaise, un matin torride de mi-festival : se laisser prendre par la main et mener jusque dans les terreurs ténébreuses de l’enfance, avec Das Plateau pour guide. Passer comme des seuils hypnotiques les étapes du Petit Chaperon rouge, ce récit si structurant de nos imaginaires. On voyait pour la dernière fois la compagnie à l’œuvre dans Poings, une peinture labyrinthique des violences conjugales. On connaît la sensibilité prestidigitatrice de Céleste Germe, metteuse en scène doublée d’une architecte, Maëlys Ricordeau, comédienne et collaboratrice artistique, et James Brandily, scénographe.
Rouge comme le rideau
Cette adaptation du conte réunit peu ou prou la même équipe artistique, qui continue d’explorer la magie des projections sur glaces et des miroirs sans tain. Au sol, un rideau rouge, et un miroir incliné au mur qui fait remonter la toile verticalement — on ne comprend le trucage que lorsque les comédiens pénètrent sur le plateau et se dédoublent dans la glace.
Ravivant les terreurs originelles du conte, la pièce remet également au jour ce que celui-ci a à nous dire, à nous et aux enfants. Céleste Germe fait le choix de puiser dans la version des frères Grimm plutôt que chez Perrault, dans celle, donc, qui accorde grâce à l’héroïne. La petite fille y est plus libre, pas si bête, touchante dans son insouciance contemplative. La metteuse en scène lui imagine un chemin psychédélique et visuellement étourdissant.
Qui a peur du théâtre contemporain ?
Un peu comme du Brecht raconté aux enfants, ce Petit Chaperon rouge dit tout de ses artifices. D’ailleurs, l’héroïne du conte n’est plus qu’une figurine à taille humaine, manipulée de la façon la plus élémentaire qui soit par la comédienne au plateau, qui en narre le récit en s’autorisant de courts instants à prendre la voix de la petite fille (cette idée seule produit un effet littéralement dément). Antoine Oppenheim, en face, campe à grands renforts de râles un loup dégoulinant de pulsions sexuelles.
L’incroyable collectif Das Plateau avance avec la croyance chevillée au corps que l’on peut montrer des images complexes aux enfants. Et joue à un jeu passionnant avec les limites du montrable, là où peut naître l’émoi esthétique. Il semble qu’une grande partie du jeune public s’en accommode bien. Quant à nous, face au pouvoir d’envoûtement de ce Petit Chaperon rouge, nous aurons partagé cette excitation comme si c’était la première.
Samuel Gleyze-Esteban – Envoyé spécial à Avignon
Le Petit Chaperon rouge, d’après le conte de Jacob et Wilhelm Grimm, traduction de Natacha Rimasson-Fertin et des extraits de Futur, ancien, fugitif d’Olivier Cadiot
Théâtre Sylvia Monfort
106 rue Brançion
75015 Paris.
Du15 au 18 mai 2024.
Durée 45 mn.
Festival d’Avignon
Chapelle des Pénitents blancs
Place de la Principale
84000 Avignon
Du 28 au 30 septembre 2022 à Châtillon – Théâtre de Châtillon
Du 4 au 15 octobre 2022 à Lyon – Théâtre Nouvelle Génération (TNG)
Du 24 au 26 novembre 2022 à Paris – La Villette
Du 30 novembre au 2 décembre 2022 à Sierre – Théâtre Les Halles
Du 7 au 9 décembre 2022 à La Roche-sur-Yon – Théâtre de La Roche-sur-Yon
Du 13 au 17 décembre 2022 à Rennes – TNBlien externe ouvrir dans un nouvel onglet
Du 11 au 14 janvier 2023 à Lille – Le Grand Bleu
Du 17 au 19 janvier 2023 à Valenciennes – Le Phénix Scène Nationale
Du 23 au 25 janvier 2023 à Angers – Le Quai – CDN
Le 29 janvier 2023 à Kingersheim – Festival Momix
Du 1 au 4 février 2023 à Saint-Denis – Théâtre Gérard Philipe – TGP
Le 11 février 2023 à Sartrouville – Théâtre Sartrouville / Yvelines – CDN
Du 7 au 9 mars 2023 à Brétigny-Sur-Orge – Théâtre de Brétigny
Du 23 au 25 mars 2023 à Nanterre – Théâtre Nanterre-Amandiers
Du 30 mars au 1 avril 2023 à Colmar – Comédie de Colmar
Du 17 au 22 avril 2023 à Vitry-sur-Seine – Théâtre Jean Vilar de Vitry-sur-Seine
Du 11 au 13 mai 2023 à Grenoble – MC2:
Du 1 au 3 juin 2023 à Noisiel – La Ferme du Buisson
Du 8 au 10 juin 2023 à Reims – La Comédie de Reims
Mise en scène Céleste Germe
Collaboration artistique Maëlys Ricordeau
Conseil dramaturgique Marion Stoufflet
Musique Jacob Stambach
Scénographie James Brandily
Lumière Sébastien Lefèvre
Images Flavie Trichet-Lespagnol
Son et vidéo Jérôme Tuncer
Costumes Sabine Schlemmer
Assistanat à la mise en scène Mathilde Wind
Crédit photos © Christophe Raynaud de Lage/Festival d’Avignon