Maëlle Poésy © Vincent Arbelet

Théâtre Dijon Bourgogne, le souffle engagé de Maëlle Poésy 

En poste depuis le 1er septembre 2021, Maëlle Poésy a à cœur de donner au CDN une dimension pluridisciplinaire, sociale et écologique.

Maëlle Poésy © Vincent Arbelet

En poste depuis le 1er septembre 2021, la metteuse en scène, formée à l’école du TNS, a à cœur de donner au CDN une dimension pluridisciplinaire, sociale et écologique. Rêvant d’un théâtre monde, elle souhaite bouleverser les frontières de l’art vivant, questionner les méthodes de travail, proposer aux artistes d’explorer de nouveaux territoires et d’éprouver autrement leur processus créatif. Rencontre. 

Quel projet mettez-vous en place depuis votre arrivée ? 

Maëlle Poésy : Je suis arrivée, il y a moins d’un an. C’est encore une année de transition, un temps d’adaptation, un temps pour rencontrer les équipes, pour appréhender le fonctionnement du lieu, pour prendre ses marques. La saison en cours est encore celle pensée par Benoit Lambert et Sophie Chesne, seule la programmation du festival Théâtre en mai, qui se tient actuellement, est de mon fait et de celui de mon équipe. C’est une vraie chance, d’avoir eu cette longue période, pour réfléchir à ce que nous souhaitions impulser à la maison, imaginer pour l’année à venir, rendre concret, étape par étape, le projet pour lequel j’ai été nommée au Théâtre Dijon Bourgogne. 

Quelles sont ses premières pierres ? 
Gloire sur la terre de Linda McLean - Mise en scène de Maëlle Poésy © Vincent Arbelet

Maëlle Poésy : Ce qui me tenait à cœur par-dessous tout, c’était de démarrer au plus vite le dispositif « Passe-muraille », qui s’inscrit dans la continuité de « Jouer partout » qu’avait initiée mon prédécesseur. L’objectif est d’aller à la rencontre de nouveaux publics, de mailler le territoire avec un projet d’itinérance qui fait entrer le théâtre dans les lycées, mais aussi depuis cette année, dans les MJC, les Maisons de quartier et des associations locales. C’est dans ce cadre, d’ailleurs, que j’ai remonté Gloire sur la Terre, de Linda McLean, que j’avais créé à Toulouse pour les jeunes artistes d’AtelierCité. Portée par six acteurs en contrat de professionnalisation, que j’ai rencontré lors de mes interventions à l’Eracm ou à l’École de la Comédie de Saint-Étienne, la pièce, imaginée dans un format itinérant, tourne depuis la fin janvier dans les établissements scolaires de Dijon et ses alentours. Chaque année, un artiste associé aura pour mission d’accompagner six jeunes comédiens, de parcourir le territoire avec eux et de présenter à Théâtre en mai, le travail de l’année. 

Théâtre en mai semble avoir été pensé comme une carte de visite de votre projet ? 
Le Chœur des amants de Tiago Rodrigues © Filipe Ferreira

Maëlle Poésy : C’est tout à fait cela. C’est comme l’acte fondateur de mon projet. Quand nous avons imaginé la programmation du festival, il nous a semblés évident qu’exceptionnellement cette année, il était important de présenter les artistes et auteurs, autrices associé.e.s à notre projet, que le public dijonnais et bourguignon se familiarise avec leur travail. Au cours des 10 jours qu’a duré l’événement, nous avons proposé aux festivaliers de découvrir Brulé.e.s de Tamara Al SaadiL’âge de nos pères de Julie Ménard et son collectif L a C a v a l e, Le Silence et la peur de David Geselson et la diversité de Gustave Akakpo. La Tendresse de Julie Bérès et Kevin Keiss, ayant été programmée, dans la saison, ce sont les seuls que nous n’avons pas invité à présenter une pièce. Par ailleurs, j’ai aussi souhaité ouvrir la programmation à l’international en invitant Teresa CoutinhoLucía MirandaRoshanak Morrowatian et Miet Warlop. C’est un début, un premier essai, espérant l’an prochain aller encore plus loin, pour permettre aux Dijonnais de découvrir d’autres artistes, d’autres cultures. Un autre point essentiel, j’ai tenu à sortir le théâtre, de ses zones de confort, d’aller hors les murs des salles de spectacles. Chloé (Moglia) investit le Parc du Château de Pouilly et moi une des cours du Musée des Beaux-Arts.

Vous êtes très portés sur les écritures contemporaines, les collectifs…
solo de Teresa Coutihno © Vincent Arbeet

Maëlle Poésy : Je souhaite aller vers un théâtre pluriel, un art vivant riche de toutes ses disciplines, mouvant, qui ne s’endort pas sur ses acquis. C’est, je pense pour cette raison que je cherche des collaborations avec des auteurs contemporains à l’écoute du monde, de la société, des artistes engagés. Souvent, leur travail d’écriture passe par le plateau, mais surtout emprunte à plusieurs médiums pour donner vie aux mots, aux intentions. C’est pour cela que je vais mettre en place le dispositif hybride où chaque saison, un auteur sera invité à s’installer un an en résidence au cœur du territoire. Il ira à la rencontre des habitants et pourra rendre compte de cette immersion par proposition de création par le médium de son choix – podcast, une courte pièce, une performance, etc. L’œuvre sera présentée durant le festival. L’année prochaine, c’est David Geselson qui développera avec les artistes associés de la saison, les Lettre non écrites. En parallèle de cela, nous avons mis en place un partenariat avec la très belle librairie la fleur qui pousse à l’intérieur qui a une annexe au Parvis. 

Dans votre projet, il y a une vraie dynamique pour renouer le contact avec les publics…
Sister de Roshanak Morrowatian Théâtre mai © Joris Hlterman

Maëlle Poésy : C’est essentiel. C’est le cœur du projet. Il était important pour moi quand j’ai postulé pour le CDN de Dijon, de questionner, de réinventer la manière dont on crée le contact avec les spectateurs et surtout avec ceux qui n’ont pas l’habitude de venir au théâtre. Le Parvis est idéal. Cette ancienne église, transformée en théâtre, permet d’imaginer un espace entre intérieur et extérieur, un lieu de vie où l’on peut organiser toutes sortes de rencontres. Pour Théâtre en Mai, nous y avons installé la radio. Au fil de l’année, on aimerait que la société civile s’invite à l’intérieur, propose de nouvelles façons de partager. Puis, nous allons aussi demander aux artistes qui se produiront sur nos scènes des cartes blanches pour habiter cet espace. Nous pourrions ainsi envisager des moments festifs, des cabarets, des lectures performatives. L’autre chose qui me semble importante à mettre en avant, c’est que nous souhaitons proposer aux équipes, aux auteurs qui ont, au cours de leur processus d’écriture, étaient à la rencontrer de métiers, de personnalités, que ce soient des anthropologues, des philosophes, des sociologues ou des humanitaires, ça sera l’occasion de ce type de rencontre quand nous présenterons Dans la mesure de l’impossible de Tiago Rodrigues, organiser des rencontres sur les sujets évoqués. 

Quand est-il de la saison prochaine ? 

Midi nous le dirade Joséphine Chafffin Roshanak Morrowatian© DR

Maëlle Poésy : Je ne peux encore rien dire, elle sera annoncée en septembre. Mais pour cette première programmation, j’ai souhaité travailler, notamment par fidélité, avec des artistes dont je connais bien le travail et dont j’avais envie qu’ils viennent à la rencontre du public dijonnais. Après nous avons étudié sur dossier certains projets, nous avons choisi aussi en fonction des thématiques, de la couleur engagée que nous souhaitions impulser. J’ai aussi été très attentive au processus créatif, à la manière dont les metteurs en scène montent leur spectacle, leur donne vie. C’est d’ailleurs dans cette optique que j’ai souhaité mettre en place un dispositif qui permet aux metteurs et metteuses en scène de questionner leur pratique, leur méthodologie au cours d’un laboratoire de recherche. C’est quelque chose qui m’a parfois manquée, juste prendre le temps de se poser, de réfléchir sans pour autant produire. L’objectif n’est pas de créer, mais de faire des rencontres, de partager des expériences, de creuser de nouvelles pistes de travail. Cette année, c’est Julie Bérès qui va en bénéficier. Elle a déjà commencé à prospecter et aimerait travailler avec un plasticien, une circassienne et un philosophe. Une partie des laboratoires de recherches sera publique afin de permettre aux spectateurs de découvrir les coulisses du théâtre. 

Propos recueillis par Olivier Frégaville-Gratian d’Amore 

Théâtre de Dijon Bourgogne
Parvis Saint-Jean 
Rue Danton
21000 Dijon

Crédit photos © Vincent Arbelet, © Filipe Ferreira, © Joris Hlterman et © DR.

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