BodyBodyBodyBody de BODY BODY (Dag Taeldeman & Andrew Van Ostade) - Festival de Marseille © DR

Soirée belge au festival de Marseille

À la Friche de la Belle de Mai, dans le cadre du festival de Marseille, le duo BODY BODY et le chorégraphe Redouan Mriziga font souffler sur la cité phocéenne, des vents contraires venus du plat pays.

BodyBodyBodyBody de BODY BODY (Dag Taeldeman & Andrew Van Ostade) - Festival de Marseille © DR

À la Friche de la Belle de Mai, le duo BODY BODY et le chorégraphe Radouan Mriziga font souffler sur la cité phocéenne, des vents contraires venus du plat pays. Esprit survolté, débridé pour l’un, cartésien et arithmétique pour l’autre, la Belgique, riche, complexe et décalée, s’invite au plateau en conjuguant musique et danse. 

Non loin de la gare de Marseille Saint-Charles, face aux voies ferrées, c’est tout un monde, une ruche, qui fourmille, foisonne, bruisse dans cette ancienne manufacture de tabac. Inaugurée, il y a 30 ans, la Friche de la Belle de Mai est une véritable fabrique d’art et de culture dédiée à la création contemporaine. C’est tout naturellement qu’entre deux concerts, quelques expositions et deux, trois spectacles, le Festival de Marseille investisse les lieux. Pour cette fin juin, deux compagnies belges, l’une d’Anvers, l’autre de Bruxelles, font vibrer les murs, danser les plateaux. 

Rock en folie
BodyBodyBodyBody de BODY BODY (Dag Taeldeman & Andrew Van Ostade) - Festival de Marseille © DR

Au petit plateau, BODY BODY, duo constitué du musicien et compositeur Dag Taeldeman et du batteur Andrew Van Ostade, électrise l’espace à coup de riffs de guitare, de beats de batterie, de chants scandés, amplifiés par des vibes techno. Axant leur performance, sorte de concert dansé, autour de l’injonction « Shake your body » – bouge ton corps – , les deux artistes, éclairés juste ce qu’il faut par une lumière tamisée venue des cintres, entonnent une mélopée gonflée à l’énergie rock. Le son se propage par vague, prend possession de la salle. L’entrée sur scène du danseur sarde Matteo Sedda accentue cet unisson parfait entre vibration musicale et emprise des corps. Comme passé au Shaker, le performeur se met sur vibrato. De face, de dos, assis, couché ou à genoux, habité de secousses imprimées par la rythmique véloce de la partition, il fait corps avec l’ensemble entraînant le public dans un ailleurs, un temps suspendu loin de toute réalité, de toute rationalité. 

Hypnotique performance 

Rien ne semble arrêter cet enchevêtrement, cette fusion des arts, qui atteint son apogée quand la voix lumineuse de la soprano Lies Vandewege vient se conjuguer à cette musique répétitive, votive, rituelle. Effets de lumières jouant des ombres, des éblouissements, la magie de BodyBodyBodyBody opère balayant un temps les résistances des corps à la transe. Sur le long court, l’itération des motifs qu’ils soient sonores ou chorégraphiques, lassent. L’équilibre fragile de l’hypnose collective est rompu. Dommage, l’extase était à portée de main. Resserrée quelque peu, l’œuvre hybride devrait gagner en puissance magnétique. 

Danse d’ici et d’ailleurs 

Juste en face, à la Cartonnerie, c’est une toute autre ambiance qui attend les festivaliers. Rapatriée à l’intérieur car un brin trop bruyante pour les voisins, la dernière création de Radouan Mriziga s’inspire des traditions philosophiques des Amazighen, groupe ethnique autochtone d’Afrique du Nord, connus dans l’Antiquité sous le nom de Libyens, où s’entremêlent les arts, les sciences, se conjuguent passé et présent. Ligne de fuite, gestes géométriques, mouvements précis, l’écriture du chorégraphe d’origine marocaine, basé à Bruxelles, est un mélange savant entre aspiration folklorique et grammaire rigoriste. Sur scène, les huit danseuses et danseurs habitent tour à tour l’espace, lui donnent une dimension poétique autant que séculaire. Tenues dorées, pailletées, rappelant quelques reines d’Égypte, vêtements ultracolorés très en vogue de nos jours, gestuelles tendues, mouvements maîtrisés, trop parfois, invitent à la fusion des cultures, à créer un lien entre Occident et Orient, à dépasser les différences, à en faire une force vive, puissante. Encore en rodage en ce soir de première, Lybia est un spectacle dense, austère autant que foisonnant, très cadré, qui devrait se fluidifier avec le temps et gagner en tempo, en rythmique au contact d’un public conquis par cette proposition certes verte mais fort prometteuse !

Olivier Frégaville-Gratian d’Amore – Envoyé spécial à Marseille

BodyBodyBodyBody de BODY BODY (Dag Taeldeman & Andrew Van Ostade)
Création 2020
Festival de Marseille
La Friche de la belle de Mai
Petit Plateau
41 Rue Jobin
13003 Marseille
Jusq’au 30 juin 2022
Durée 55 min environ 

Concept de Dag Taeldeman & Andrew Van Ostade 
Musique de Dag Taeldeman & Andrew Van Ostade 
Chorégraphie et interprétation de Matteo Sedda 
Soprano – Lies Vandewege 
Création lumière d’Helmut Van Den Meersschaut 
Son de Saul Mombaerts

Lybia de Radouan Mriziga
La cartonnerie
La Friche de la belle de Mai
Petit Plateau
41 Rue Jobin
13003 Marseille
Jusq’au 30 juin 2022
Durée 1h20 environ

Conception et chorégraphie de Radouan Mriziga 
avec Sondos Belhassen, Mahdi Chammem, Hichem Chebli, Maïté Minh Tâm Jeannolin, Senda Jebali, Feteh Khiari, Youness Khoukhou, Radouan Mriziga, Dorothée Munyaneza 
Assistants à la chorégraphie – TBC 
Dramaturgie d’Esther Severi
Scénographie de Radouan Mriziga 
Costumes d’Anissa Aidia 
Création lumière de Radouan Mriziga 
Régie lumière – TBC

Crédit photos © DR

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