Le chorégraphe, fondateur du Pavillon Noir à Aix-en-Provence, ouvre le 11 juillet prochain le festival Paris l’Été, avec Boléro, extrait de Gravité, pièce créée en 2018 à la Biennale de la Danse de Lyon. Attention, sublime et envoûtant !
Sous la voûte de verre et d’acier de la Grande Halle de la Villette, Angelin Preljocaj reprenait, la semaine dernière, son éblouissant Gravité. L’occasion pour nombre de spectateurs parisiens de voir ou revoir, cette pièce très emblématique du travail de l’artiste né à Suzy-en-Brie en 1957. Revenant à la source de ses recherches chorégraphiques, lignes épurées, gestes précis, juste soulignés, écriture exigeante, au cordeau, il invite à une balade puissante autant que légère, lente autant que rapide. Un moment suspendu qui défie la pesanteur !
Un ballet en noir et blanc
Dans l’obscurité la plus totale, les bruits de pales d’un immense ventilateur invisible fendent l’air. Au loin, au centre de la scène, une masse informe se dessine. La lumière de plus en plus tamisée révèle des corps étendus, enchevêtrés. Des notes de musique classique s’échappent délicatement des baffles. Une main se tend. Les 13 interprètes lentement se meuvent. Comme aimantés par le sol, entièrement soumis à une gravité d’une rare intensité, ils semblent coller au sol. Puis magie de la danse, des effets d’ombres, de lumières, ils semblent flotter dans les airs. Vêtus de costumes tantôt noirs, tantôt blancs, imaginés par Igor Chapurin, les danseurs se cherchent, se repoussent pour mieux s’unir, ne faire plus qu’un. Jouant des contrastes, alternant pas de deux, danses de groupe, passant de tempo moderato à d’autres plus allegro, d’une grammaire classique à une autre plus contemporaine, Angelin Preljocaj multiple les instants de grâce et signe avec Gravité, un ballet fascinant, vivant, certainement l’un de ses plus envoûtants.
Un boléro comme chœur vibrant
S’appuyant sur les musiques de Bach, de Chostakovitch, d’Iannis Xenakis, de Philip Glass ou de Daft Punk, le chorégraphe déploie 1h20 durant sa langue, son expressivité artistique dans ce qu’elle a de plus épuré, de plus essentiel. Parfaitement maîtrisée, portée par une troupe virtuose, l’œuvre s’insinue implacablement dans l’âme du spectateur au plus profond de son être pour ne plus le quitter, l’enchanter, le laissant captivé par cette danse totale. Toujours plus intense, plus fort, Gravité atteint son acmé quand incongrues les notes du Boléro de Ravel s’entrelacent à des sons plus technos, les débordent avant de totalement les recouvrir. À l’unisson, le ballet du Pavillon noir, en cercle au cœur de la scène, ne fait plus qu’un. Une masse blanche de tissus, de chairs, de corps mouvants, multiples, telle une vague concentrique, déferle pour mieux refluer. Sans crier gare, sans avertissement, Angelin Preljocaj tutoie les dieux, les anges. Son boléro, pièce emblématique dont nombre de chorégraphes se sont emparés, est tout simplement hypnotique.
Le Louvre comme écrin
Exceptionnellement, le 11 et 12 juillet prochain, le chorégraphe investit le Louvre, plus exactement la Cour Lefuel, joyau du second Empire habituellement inaccessible au public, et propose pour ouvrir le bal du festival Paris l’Été, une version augmentée de son somptueux Boléro. Visite libre du musée et déambulation aile Denon en sus, font de ces deux soirées, des événements à ne manquer sous aucun prétexte !
Olivier Frégaville-Gratian d’Amore
Gravité d’Angelin Preljocaj
Dernière représentation à la Grande Halle de la Villette
Extrait – Le Boléro
Ouverture de Paris l’Été
les 11 & 12 juillet à 21h & 22h – Pyramide – Musée du Louvre
Chorégraphie d’Angelin Preljocaj
Musiques de Maurice Ravel, Johann Sebastian Bach, Iannis Xenakis, Dimitri Chostakovitch, Daft Punk, Philip Glass, 79D
Costumes d’Igor Chapurin
Lumières d’Éric Soyer
Assistant, adjoint à la direction artistique- Youri Aharon Van den Bosch
Assistante répétitrice – Cécile Médour
Choréologue – Dany Lévêque
Danseurs à la création – Baptiste Coissieu, Leonardo Cremaschi, Marius Delcourt, Léa De Natale, Antoine Dubois, Clara Freschel, Isabel García López, Véronique Giasson, Florette Jager, Laurent Le Gall, Théa Martin, Víctor Martínez Cáliz, Nuriya Nagimova
Crédit photos © Jean-Claude Carbonne