En ouverture de June Events, le 30 mai 2022, le chorégraphe américain, basé en Belgique, propose un diptyque comme un temps d’écoute de la nature qui nous entoure et de nos corps intérieurs. Explorant, en deux temps, l’espace de la forêt et du plateau, il signe une œuvre introspective autant que méditative.
Pouvez-vous nous raconter en quelques mots comment la danse est entrée dans votre vie ?
Daniel Linehan : J’ai découvert la danse à l’âge de 10 ans, dans un camp d’arts du spectacle pour enfants dans ma ville natale d’Olympia, dans l’État de Washington. J’aimais toutes sortes d’arts de la scène — le théâtre, le chant, la clarinette et bien sûr la danse —, et au fil du temps, ce médium, ce mode d’expression est devenu de plus en plus central dans ma vie.
Quel est votre parcours ?
Daniel Linehan : J’ai continué à étudier la danse à l’Université de Washington à Seattle, puis j’ai vécu à New York pendant quatre ans en tant qu’interprète et chorégraphe. En 2008, j’ai déménagé à Bruxelles pour étudier à PARTS, j’y suis resté et j’y ai installé ma compagnie Hiatus.
Vous êtes programmé au festival June Events. Que représente cet événement pour vous ?
Daniel Linehan : J’ai hâte de présenter mes travaux à June Events. J’aime énormément l’idée d’un lieu situé au cœur du bois de Vincennes, un peu à l’écart des affaires du centre-ville. La dernière fois que j’ai présenté une œuvre au festival, c’était en 2015 avec Un Sacre du Printemps, et, j’avoue, c’est un plaisir de revenir et de partager à nouveau mon travail avec le public parisien.
Pour l’occasion, vous créez un diptyque dont une partie se joue en plein air, l’autre en intérieur. Comment avez-vous travaillé ?
Daniel Linehan : Nous avons répété pendant six semaines en plein air dans les bois en Belgique, passant du temps chaque jour à connecter nos corps et nos sens au cadre de vie des arbres et des animaux qui nous entourent. Ce n’était pas toujours facile, avec tous les éléments incontrôlables comme la pluie, le froid et la boue. Cela a également rendu le processus vivant et dynamique, répondant au moment et abandonnant la tendance humaine à essayer de tout contrôler. Pour la deuxième représentation en salle, nous avons voulu équilibrer avec un temps d’écoute, d’introspection et d’ouverture sur nos propres émotions, nos ressentis et notre sensibilité. On a souhaité dépasser le simple cadre de l’espace scénique pour plonger à l’intérieur de nous-même.
Qu’est-ce qui vous a inspiré dans cette proposition ?
Daniel Linehan : J’ai été inspiré par une journée que j’ai partagée avec les danseurs dans les bois en 2019. Nous avons passé du temps à être silencieux, à écouter l’environnement. Cela a ouvert tellement de joie en moi que je voulais penser à cela comme la meilleure façon de travailler sur une création artistique : se taire et écouter. Il y a tellement de bruit de nos jours, alors que nous avons besoin de ces moments de silence pour retrouver notre sensibilité naturelle et notre profonde préoccupation pour le monde.
La manière de créer, d’écrire est-elle différente selon le lieu, l’environnement ?
Daniel Linehan : Oui, nous adaptons toujours la représentation dans les bois aux différents lieux, et elle change en fonction de la météo, de l’heure de la journée, des chants d’oiseaux… Tout fait partie de la représentation et nous restons attentifs pour y répondre.
Comment les deux spectacles s’articulent-ils ?
Daniel Linehan : Les deux spectacles s’inscrivent dans les cycles naturels de la nature : jour-nuit, été-hiver, naissance-mort. Nous avons besoin de temps pour sortir et être à l’air frais, écouter les arbres et dialoguer avec le monde. Et nous avons aussi besoin de temps pour aller vers l’intérieur, pour nous rassembler dans le noir et écouter nos sens intérieurs. Ainsi, le diptyque nous invite à embrasser les deux énergies – l’engagement extraverti avec le monde et la contemplation intérieure. Les deux sont des éléments nécessaires du rythme naturel de nos vies et de la vie de tous les êtres vivants.
Propos recueillis par Olivier Frégaville-Gratian d’Amore
Listen Here de Daniel Linehan
June Events
Atelier de Paris
Route des Grandes manœuvres
75012 Paris
Listen Here: These Woods – 30 mai à 9h et 20h / rdv au Rosa Bonheur à l’Est (Porte Jaune, Av. de Nogent, 75012 Paris)
Listen Here: This Cavern – 1er et 2 juin à 21h au Théâtre de l’Aquarium (La Cartoucherie, 2 route du Champ de Manœuvre, 75012 Paris)
Concept & chorégraphie de Daniel Linehan
Création & interprétation de Renaud Dallet, Gorka Gurrutxaga Arruti, Anneleen Keppens, Jean-Baptiste Portier, Louise Tanoto
Dramaturgie d’Ingrid Vranken
Costumes de Frédérick Denis
Crédit photos © Danny Willems