Le drapeau de la ville flotte sur la façade en pierre de l’ancien couvent des Franciscains entièrement ravalé, rénové. En ce jour particulier, où une nouvelle salle de théâtre voit le jour, volant la vedette au mythique Negresco, les édiles de Nice, des membres de l’Académie des Beaux-arts, dont Muriel Mayette-Holtz fait partie, et quelques autres artistes ont fait le déplacement. Plus une place n’est disponible sur les tout nouveaux gradins rouge carmin. Afin d’inaugurer comme il se doit ce nouveau haut lieu de la Culture niçoise, l’hôtesse des lieux a concocté un petit spectacle d’introduction, une sorte de cabaret hyper référencé et joliment débridé dont elle a le secret. Entourée de la troupe permanente du TNN – Augustin Bouchacourt, Ève Pereur, Jonathan Gensburger et Frédéric de Goldfiem – elle conte et chante la vie trépidante de cette bâtisse construire au XIIIe, qui au fil des ans, fut cloître, hôtel, cinéma, dancing, siège de la CGT et local à poubelles. De quoi faire un roman épique, et pourquoi pas un théâtre, une salle où l’art vivant trouve refuge et s’épanouit en toute liberté.
Les dessous d’une icône
Pour ancrer ce moment singulier dans l’histoire de l’ancienne Nikaïa, il fallait une artiste unique, une comédienne singulière, une personnalité autant discrète que généreuse. Regard clair, cheveux noir jais coupés très courts, visage lumineux, reconnaissable entre mille, où se devinent les traits de parents illustres, Isabella Rossellini habite d’un sourire, d’un geste, d’une présence irradiante cette nouvelle scène installée dans le chœur de l’ancienne église romane qui a vu défiler sous ses épais murs de pierres blanches plus de 700 ans d’histoire. Dirigée avec finesse par Muriel Mayette-Holtz, l’actrice, ancienne mannequin immortalisée par Richard Avedon, livre avec espièglerie sa passion immodérée pour les écrits de Darwin, son goût prononcé pour le décryptage de la gestuelle qui nous permet de communiquer, son penchant empathique pour les animaux, la nature et le genre humain.
Une folle balade au pays de la comédie
Seule sur scène, Isabella Rossellini se joue des impressions, des ressentis du public. Mettant en parallèle son métier de comédienne et sa formation en éthologie, l’artiste dévoile un imaginaire luxuriant et esquisse en creux l’histoire de sa vie. Reprenant les mêmes mots ou les mêmes gestes avec des intonations ou des intentions différentes, elle s’amuse avec un bel appétit, une malicieuse gourmandise, à décoder tout un monde invisible, celui qui régit nos sociétés, nos rapports à l’autre, notre manière d’interagir que l’on soit animal, ou humain. Robe de paon, costume de gorille, habit de lumière ou tenue d’Ève, l’actrice vulgarise avec intelligence et poésie les lois de l’évolution. Séductrice, à l’écoute de l’autre, tentatrice, elle mène sa revue et fait le show. Un magnifique feu d’artifice de drôlerie, de fantaisie et d’ingéniosité de fort bon augure pour ce tout nouveau TNN !
Olivier Frégaville-Gratian d’Amore – Envoyé spécial à Nice
Le Sourire de Darwin, un spectacle conçu par Isabella Rossellini
Aux Franciscains
TNN
4‑6, Place Saint‑François
06300 Nice
Jusqu’au 30 avril 2022
Durée 1h15 environ
Mise en scène Muriel Mayette-Holtz
avec Isabella Rossellini
Décor & costumes Rudy Sabounghi Lumière Pascal Noël Musique Cyril GirouxVidéos Andy Byers, Rick Gilbert Conception image Andy Byers Assistant d’Isabella Rossellini Gregorio Franchetti Assistant modélisation décor Julien Soulier Assistant costumes Quentin Gargano-Dumas