En cette journée internationale des droits des femmes, Tamara Al Saadi présente ce midi, à la maison des femmes de Saint-Denis, dans le cadre du festival L’Équipé.e en partenariat avec les Plateaux Sauvages et le TGP, une lecture de Simone 1975, texte écrit par Leïla Anis. À cette occasion, l’autrice et metteuse en scène franco-irakienne a accepté de nous livrer quelques réflexions sur les femmes d’aujourd’hui, leur place dans la société, l’éducation qui impose à toutes de baisser le regard.
Tout ce que je pourrais exprimer qui mettrait mal les certitudes de l’Autre à savoir mieux que moi, pour moi.
Mon regard serait susceptible d’être un affront, une provocation, une insolence passible de remontrances de la part des parents, instituteurs, surveillants, gardiens d’immeuble, directeurs, policiers, guichetiers, amis, collègues, associés, médecins, patrons, contrôleurs, serveurs, banquiers, chauffeurs de taxi, inconnus…
Tout ce que je pourrais exprimer qui ébranlerait une « hiérarchie naturelle », parce que – somme toute, quoi ? – la violence physique n’est jamais loin.
Parce que mon regard pourrait déranger.
Présager d’une remise en cause.
On apprend aux petites filles à baisser les yeux pour qu’elles disparaissent, pour autoriser l’inconsidération afin que leur être ne soit pas une donnée envisagée dans l’équation du désir, du confort ou du pouvoir de l’Autre.
On apprend aux petites filles à baisser les yeux parce qu’une fois adultes, on pourra continuer à les considérer comme des enfants.
On apprend aux petites filles à baisser les yeux afin de les aveugler, parce que regarder, c’est comprendre.
Mais, si le regard tient, ne se baisse plus, désapprend le réflexe ?
Si le signe change, s’il ne permet plus, ne valide plus ? Si ne pas dire mot, ce n’était plus consentir ?
Si je ne baisse plus jamais les yeux, que se passera-t-il ?
Tamara Al Saadi, Autrice, comédienne et metteuse en scène
Festival l’Équipé·e
4e Édition
Les plateaux Sauvages
Istiqlal de Tamara Al Saadi
Théâtre des Quartiers d’Ivry
actuellement en tournée
Crédit portrait © Thomas Ledoux