Les amants de la commune ©Eliot Blondet Abacapress

Les amants de la Commune, comme un cri du cœur

Au Théâtre Antoine, Isabelle Carré et Pierre Deladonchamps rendent hommage à ceux qui se levèrent et tombèrent pour la Commune de Paris.

Au Théâtre Antoine, Les Amants de la Commune de Laurent Seksik, mis en scène par Géraldine Martineau et interprété par un duo de charme, Isabelle Carré et Pierre Deladonchamps, rend hommage à ceux qui se levèrent et tombèrent pour ce bel espoir en chantier que fut la Commune de Paris.

Les amants de la commune ©Eliot Blondet Abacapress

La guerre de 1970 et la Commune de Paris sont deux événements trop souvent occultés de nos manuels d’Histoire. Pourtant, ils sont au cœur de la compréhension de ce qui se passera ensuite et fera de ce XXe siècle ce qu’il est. Pas facile pour un pays d’admettre sa défaite. Alors, on a minimisé ce que fut le siège de Paris, avec ses bombardements, sa famine, ses peurs, son occupation et sa résistance. Seksik décrit fort bien cette tragédie et, parce que l’actualité nous rattrape toujours, nous ne pouvons que songer aux Ukrainiens. Pas facile, pour un État, d’avoir vu le temps des cerises, ces vieilles valeurs bousculées et fragilisées. Alors, on a bâillonné la Commune, ce cri d’un peuple insurgé qui rêvait à une société nouvelle. Cent cinquante ans après, écoutons comment ces ouvriers et artisans se sont battus pour Paris et la Commune.

Aimer à en perdre la raison

N’étant pas du même milieu, leurs routes n’auraient jamais dû se croiser. Elle est au service de Madame, une grande comédienne. Il est officier, saint-cyrien. Elle est du peuple. Il est du côté de l’ordre établi. Mais, on le sait, Cupidon est un drôle de zozo qui lance ses flèches malicieusement en se moquant de la logique. Madame aurait souhaité qu’il épouse sa nièce, mais c’est de la bonne qu’il s’est épris. Ils vont s’aimer le temps d’un soir et se jurer un amour éternel. Et la guerre va séparer les amants. L’auteur met alors en place entre eux un échange épistolaire, où elle lui racontera le siège puis la Commune, où il lui racontera la guerre, sa détention et sa libération par les Prussiens pour mater l’insurrection. Évidement que ces échanges de courrier à l’époque ne devaient pas être possibles, mais le procédé littéraire mis en place par Seksik fonctionne très bien et permet de comprendre ce qui se passe dans les deux camps, ce que chacun traverse et ressent.

Commun commune

Les amants de la commune ©Eliot Blondet Abacapress

Géraldine Martineau, pensionnaire de la Comédie-Française, a mis en scène ce spectacle avec une belle vision poétique. Son dispositif scénique est de toute beauté. Elle dynamise cet exercice difficile qu’est la correspondance, qui pourrait vite entraîner un certain ronron : je t’écris, je te réponds. Rien de statique, que du mouvement, celui de la jeune femme pris dans le tourbillon de la révolte et celui de l’homme qui s’inquiète depuis son camp de prisonnier puis de sa garnison lorsqu’il s’apprête à monter sur Paris pour tirer sur les fédérés. Pierre Deladonchamps, habitué des plateaux de cinéma et de télévision, fait des premiers pas sur une scène de théâtre très prometteurs. Droit dans ses bottes d’officier, il sait montrer les tourments et la grandeur d’âme de son personnage, qui est avant tout un soldat à la conscience civile. En refusant d’obéir aux ordres, comprenant ce qu’ils avaient d’injuste, il connaît la sentence : le peloton d’exécution. Isabelle Carré est solaire dans ce magnifique personnage de femme qui, grâce aux communards, comprend qu’elle a le droit de penser, d’avoir des opinions, et surtout le droit de prendre enfin place dans la société. Elle démontre admirablement bien que l’espoir fait vivre.

Marie-Céline Nivière

Les amants de la Commune de Laurent Seksik avec la collaboration d’Antoine Mory
Théâtre Antoine
14 boulevard de Strasbourg 75010 Paris
Jusqu’ au 24 avril
Les vendredis, samedis et dimanche 3 avril à 19h à 16h, les dimanches 10, 17, 24 avril à 16h
Durée 1h10

Mise en scène de Géraldine Martineau de la Comédie-Française
Avec Isabelle Carré et Pierre Deladonchamps
Scénographie de Salma Bordes
Lumières de Laurence Magnès
Musique de Simon Dalmais

Crédit photos ©Eliot Blondet Abacapress

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