Après plus de 20 ans de création en plein air, le festival de théâtre Les Esquisses d’été de La Roche sur Yon fera, cet été, ses adieux au Jardin des compagnons. Son directeur et co-fondateur, Laurent Brethome, prépare pour 2022, un tout nouveau projet, baptisé joliment Les Nuits menteuses. Plongée au cœur du procession de réflexion du comédien et metteur en scène vendéen.
2021 sonne le glas de esquisses, qui vont fêter leur 20 ans. Pouvez-nous raconter leur genèse ?
Laurent Brethome : Quand nous avons créé en 2001, Les Esquisses avec Philippe Sire, alors professeur de Conservatoire, ce festival répondait à un désir pour une très jeune génération d’investir l’espace public, l’été à La Roche-sur-Yon. Au commencement, il y avait des artistes à peine sortir de leur formation comme Thomas Blanchard, Frédéric Giroutru, Emilie Leroux, Antoine Herniotte, Anne Rauturier ou encore François Jaulin. Toutes et tous ont depuis creusé un sillon magnifique et sont des acteurs à part entière de la vie théâtrale française.
Grâce à une philosophie de projets qui consistaient à « esquisser » en peu de temps des formes théâtrales singulières avec peu de moyens, nous avons toujours cherché à nous ouvrir à d’autres horizons, d’autres esthétiques. Nous pouvons nous féliciter aujourd’hui d’avoir vu se croiser dans le jardin des Compagnons des artistes comme Audrey Bonnet, Jean-Damien Barbin, Michel Fau, Julie Recoing, Angélique Clairand, Yannick Jaulin, Thierry Jolivet, Jérémy Lopez…
Quelles philosophies ont nourri Les Esquisses ?
Laurent Brethome : Au départ, c’était une utopie intime et précieuse où le temps était suspendu plusieurs soirées d’été à La Roche-sur-Yon. Nous n’avons volontairement jamais voulu avec Philippe Sire faire grandir ce festival plus que ce qu’il n’était… On nous a proposé plus de moyens pour du « plus grand spectacle », des jauges plus importantes…. On s’y est toujours refusé, car nous ne le souhaitions pas.
C’était un laboratoire à ciel ouvert pendant 3 semaines en Vendée dans un rapport de proximité très grand avec le public. Nous nous refusions à accueillir plus de 200 personnes par soir… Il s’agissait d’être en direct, avant, pendant et après avec le public. C’est ce qui nous manquait l’année avec la compagnie quand nous tournions sur les plateaux des théâtres en France… Ce lien direct avec les publics et la possibilité d’échanger avec chacune, avec chacun après la représentation.
Quel est le bilan de ces nombreuses années ?
Laurent Brethome : À l’aube de cette 21e et dernière édition, on peut noter que Les Esquisses ça a été en termes de chiffres : 67 Esquisses apéritives (lectures améliorées), 33 Esquisses tréteaux (créations théâtrales), 7 Esquisses en balades (petites formes théâtrales allant à la rencontre de tous les publics dans des lieux où le théâtre ne va que trop peu), 3 Esquisses des amateurs (créations avec des non-professionnels sous forme d’un chantier théâtral), 7 Esquisses inclassables (cabaret, pièces radiophoniques, cinéma…). Plus de 300 représentations… Près de 120 artistes qui y ont participé….
Est-ce la fin d’un cycle ?
Laurent Brethome : Pour Philippe Sire et moi, il y avait la nécessité d’inventer autre chose et de ne pas se reposer sur nos lauriers d’un festival qui fonctionne très bien, mais que nous ne regardons plus avec les yeux de nos 20 ans… Il s’agit aujourd’hui d’écrire un nouveau chapitre et de savoir s’arrêter au moment où le succès du festival est à son acmé. C’est donc le début d’un nouveau cycle sans avoir attendu que le précédent se termine… c’est être encore une fois-là où le ne nous attend pas.
Par quoi souhaitez-vous les remplacer ?
Laurent Brethome : Les Esquisses d’été vont tirer leur révérence en juillet 2021 pour faire place à un nouveau festival : Les Nuits Menteuses. Ce nouveau événement est né d’une envie qui s’articule autour de plusieurs projets dont nous rêvons avec l’équipe du Menteur depuis plus de 2 ans. Il s’agit pour nous de donner une identité forte à un nouvel événement yonnais qui, au mois de juillet, avec un travail en fil rouge sur toute l’année rayonnera au-delà de notre cité.
L’ambition de ce festival tout neuf est de donner une vraie place au monde du théâtre amateur, des élèves en formation mais aussi des professionnels.
La Vendée est un des départements le plus dynamique en France en termes de pratique amateur. À partir de grandes aventures théâtrales nationales comme au Théâtre du Peuple à Bussang dans les Vosges ou comme au Festival de l’Aria en Corse, l’idée et la nécessité d’un festival de transmission avec un décloisonnement social et intergénérationnel s’est imposée.
Quel est le moteur de ce nouveau chantier ?
Laurent Brethome : Les Nuits menteuses se rêvent comme une immense aventure humaine. Je parle plus que jamais d’un festival avec et pour tous, toute l’année.
Un festival qui trouvera sa finalisation en juillet après une année de travail.
Un festival ayant pour thème la transmission.
Un festival que l‘on construit ensemble.
Un festival qui lancera régulièrement des appels à participation.
Un festival où, par la multiplication des identités présentes, nous ferons l’expérience de la fraternité.
Un festival singulier et nécessaire dans le paysage régional et départemental. (Le Puy du Fou n’est qu’à 35 kilomètres…Ne l’oublions jamais !)
Coté théâtre, suite à cette année de pandémie, où en sont vos projets ?
Laurent Brethome : Ils sont nombreux et je dois bien avouer qu’en ces temps sombres pour notre profession, je me sens très privilégié….
Différentes reprises, créations ou commandes vont sillonner les routes et nous amener à fréquenter de nombreux plateaux de festivals de pleins airs, des Scènes nationales, des Scènes conventionnées, des Théâtres municipaux ou des Centre Dramatiques Nationaux.
Quelques exemples comme la création de Amsterdam (création en 2022 en production avec le Quai – CDN d’Angers) ; mise en scène de La Prod DESC du Quai ; création et mise en route du festival Nuits Menteuses ; création d’Une Noce à l’invitation du festival international de l’Aria en Corse.
Sans oublier bien sûr mon activité de coordinateur du Département théâtre du Conservatoire à rayonnement Départemental de la Roche-sur-Yon et de dramaturgie auprès de Mickael Le Mer pour la compagnie de danse Spoart.
Propos recueillis par Olivier Fregaville-Gratian d’Amore
Les Esquisses d’Été – La Roche-sur-Yon
Jardin des compagnons
Du 23 au 30 juillet 2021
Une Laborieuse Entreprise d’Hanokh Levin
Mise en scène de Laurent Brethome
Festival Esquisses D’été 2020 – La Roche-Sur-Yon
Crédit photos © DR et © © Gérard Llabres