La pandémie galope. Les « réas » sont saturées. Les soignants exsangues. Seize départements sont à nouveau soumis à des restrictions sanitaires drastiques, périphrase gouvernementale pour ne pas dire qu’on est reconfiné. Tout devient incompréhensible, inquiétant, sombre. « N’y aurait-il pas quelque chose d’insensé, d’absurde, d’abracadabrantesque dans cette France-là? »
Dans une sorte de folie ambiante, d’aliénation mentale, d’enfermement psychologique, les esprits s’échauffent, décompensent, ont d’étranges et dramatiques pulsions. A Montpellier, s’est joué, il y a quelques jours, un drame. Alain Françon a été poignardé, sans motif apparent dans une rue du centre-ville. Heureusement, ses jours ne sont plus comptés. Décidément, rien ne va plus. Le monde semble marcher sur la tête.
Seule liberté, dernier souffle d’espoir, une attestation obligatoire permet à tous les confinés de rester à l’extérieur tout leur saoul, jusqu’à 19h. Gabriel Attal, porte-parole du gouvernement, l’a dit « tout ce qui peut se faire dehors, on le fait dehors ». Si aucun mot sur le monde du spectacle vivant sous perfusion n’a été prononcé, n’y aurait-il pas une voie, une brèche, une faille dans cette stratégie « boulgiboulguesque », censée endiguer la transmission du virus.
Comment ne pas penser aux structures culturelles occupées, plus de soixante-dix à ce jour, qui quotidiennement tiennent des AG, proposent des mini concerts, de petits spectacles, des « happenings », sur les parvis des théâtres afin d’alerter le public sur l’injustice flagrante faite à tout un pan de l’économie, tout un secteur à l’arrêt depuis plus de 150 jours sans aucun motif valable, au-delà d’une forme d’incohérence politique, de posture. Bien au-delà de nos frontières, le mouvement commence à faire tache d’huile en Europe, le Théâtre national de Bruxelles est à son tour en cours d’habitation.
Porté par des élèves, des étudiants en art, ainsi que par des intermittents et des précaires, le vent de la révolte, soutenu par une grande partie du monde de la culture, dans tout ce qu’il a d’hétéroclite, d’hétérogène, de mélangé, souffle sur la terre de France. En bon entente avec les directeurs des lieux habités, ils crient leur détresse, leur angoisse sur un avenir incertain, pour sauver leurs rêves. En demandant la prolongation d’une année blanche, la suspension de la réforme chômage et la réouverture au plus vite des lieux de culture dans le respect de règles sanitaires sérieuses, sans pour autant gêner les répétitions en cours, ils revendiquent le droit à être essentiels, à être considérés et entendu.
Le printemps est inexorable. Partout en France, ce week-end, la culture se mobilise pour faire entendre sa voix. L’équipe de l’Œil d’Olivier se joint à ce mouvement et soutient cette initiative qui se veut et doit être festive.
Olivier Fregaville-Gratian d’Amore, rédacteur en chef de l’Œil d’Olivier
Crédit photos © OFGDA