A l’Opéra-Comédie, dans le cadre de la 40 édition bis de Montpellier Danse, avant d’investir au printemps Chaillot, l’israélien Emanuel Gat présente sa dernière création, une œuvre inspirée par la musique pop rock de Tears for Fears. Un fabuleux feu d’artifice chorégraphique porté par une troupe de danseurs lumineux et extraordinaires.
Peu à peu, l’Opéra-Comédie prend vie. La salle se remplit, chacun cherchant la meilleure place. Un siège vide entre chaque spectateur, le masque sur le visage, toutes les règles sanitaires sont respectées à la lettre. Les conversations vont bon train. Malgré les restrictions de plus en plus strictes, l’ambiance est à la fête, Les spectateurs ont envie de voir et revoir de l’art vivant. Bien connu des Montpelliérains, pour avoir participé à plusieurs éditions de Montpellier Danse, Emanuel Gat a su au fil du temps séduire un public de plus en plus nombreux. Tous sont au rendez-vous.
Sons et lumières
Pas d’annonce, la salle plonge d’un coup, d’un seul, dans le noir le plus complet. Les énormes baffles placés sur le devant de la scène rugissent les premières notes très rock d’Ideas as opiates du groupe britannique Tears for Fears. En quelques minutes, l’atmosphère se réchauffe. A l’arrière du plateau nu, le mur s’ouvre en fines bandes laissant entrevoir, au loin, les coulisses. Des rayons de lumières zèbrent l’air. L’un après l’autre, les douze danseurs, vêtus de magnifiques costumes baroques décalés, signés Thomas Bradley – un des danseurs de la troupe – , prennent possession de l’espace. Dans la pénombre, ils prennent la pose, dos au public. Les silhouettes sont ciselées par un clair-obscur savamment imaginé par Emanuel Gat. Le show peut commencer. La musique est bonne, il y a plus qu’à danser.
De somptueux tableaux chorégraphiques
Enchaînant les tubes très années 1980 – que le public se surprend à fredonner – , les balades, les silences, les solos, les pas de deux, les danses de groupe, le chorégraphe israélien compose une sorte de fascinante comédie musicale flamboyante et kaléidoscopique. Chaque morceau se transforme en tableau rappelant quelques chefs d’œuvres de la Renaissance italienne, quelques bacchanales antiques, romantiques. Le chatoiement des étoffes, les muscles blancs, saillants des corps dénudés des danseurs donnent à l’ensemble une puissance esthétique, une force d’une rare intensité qui attrape le spectateur pour ne jamais le lâcher.
Une écriture collective, précise
En maître de cérémonie, en architecte d’une chorégraphie multiple et riche de ses interprètes, Emanuel Gat invite chacun de ses danseurs, tous excellents, tous ayant une présence scénique unique – à proposer ses propres mouvements, sa propre interprétation gestuelle de telle ou telle musique. De cette substance dense, variée, bigarrée, il construit une matière harmonieuse tour à tour fluide ou saccadée, une grammaire délicate, fragile qui s’appuie sur l’écoute des uns des autres. Il en résulte une danse vibrante, humaine, une fièvre communicative.
Une harmonie rock et baroque
Emporté par la beauté de cette subtile alliance entre mouvement, musique, lumières, scénographie et jeu, LOVETRAIN2020 est du très grand Gat, un vrai show grandiose et hypnotique, un spectacle à la croisée des arts à déguster sans modération. Le public montpelliérain ne s’y est pas trompé en cette première mondiale, debout bien avant que la dernière note ne résonne, il applaudissait à tout rompre. Chapeau les artistes et que vive la Danse !
Olivier Frégaville-Gratian d’Amore – Envoyé spécial à Montpellier
LOVETRAIN2020 d’Emanuel Gat
Montpellier Danse 40 bis
Opéra-Comédie
1 Boulevard Victor Hugo
34000 Montpellier
Jusqu’au 6 octobre 2020
Durée 1h00 environ
Tournée
Du 30 mars au 8 avril 2021 à Chaillot – Théâtre national de la Danse
Musique de Tears for Fears
Chorégraphie et lumière d’Emanuel Gat
Costumes de Thomas Bradley, Wim Muyllaert
Direction technique – Guillaume Février
Son de Frédéric Duru
Créé avec et interprété par Eglantine Bart, Thomas Bradley, Robert Bridger, Péter Juhász, Michael Loehr, Emma Mouton, Eddie Oroyan, Rindra Rasoaveloson, Ichiro Sugae, Karolina Szymura, Milena Twiehaus, Jin Young Won
Crédit photos © Julia Gat