Après son succès à la Michodière et sept nominations aux Molières, ce joyeux Canard à l’orange s’est installé au Théâtre de Paris, pour illuminer les fêtes.
Qu’est-ce qu’on aime le théâtre de boulevard quand il est bien construit ! Le canard à l’orange version 2018-2019 est un bijou finement ciselé par Nicolas Briançon qui signe une mise en scène délirante. Il rend hommage à ce style qui fit les belles soirées du théâtre de la fin du siècle dernier. Les maîtres s’appelaient alors Barillet et Grédy, Roussin, Dorin… pour les auteurs et, du côté des comédiens, Poiret, Maillan, Pâcome, Roux, Le Poulain…
Dans cette comédie, imaginée par William Douglas Home et adaptée par Marc-Gilbert Sauvageon, nous retrouvons le fameux trio du mari, de la femme, de l’amant… Ici, le temps d’un week-end, le mari va mettre tout en œuvre pour récupérer sa femme, se jouant d’un amant totalement dépassé par la situation. Comme un joueur d’échecs, l’époux avance ses pions avec une parfaite maîtrise. Cela fonctionne parce que les ingrédients sont ceux qui donnent toute leur saveur à ce genre de pièces, à savoir les rebondissements, les malentendus, les répliques qui fusent…
Un bon boulevard fonctionne surtout par la grâce de ses interprètes. Il faut du savoir-faire et beaucoup de talent pour nous embarquer dans cette folie vaudevillesque. Et là, nous sommes gâtés ! Nous avons sur scène des comédiens exceptionnels. Avec une mauvaise foi qui nous régale, Nicolas Briançon interprète le mari volage qui se découvre cocu. Digne d’un Jean Poiret, qui a joué ce rôle autrefois, il s’amuse avec ce personnage qui manie la mauvaise foi avec grand art. La délicieuse Anne Charrier, rivalise de charme et de talent. Elle est toute à son aise dans ce registre. François Vincentelli est impayable en amant qui devient le dindon de la farce. Son Molière est amplement mérité. Il a composé un personnage haut en couleur. La formidable Sophie Artur, en gouvernante revêche et grognon, ne manque pas de piquant. Quant à la jeune Camille Lavabre, en longiligne secrétaire, elle sait tenir tête à ses quatre aînés et nous lui prévoyons un bel avenir.
Pour parfaire cet admirable travail, Nicolas Briançon a eu la bonne idée de laisser la pièce dans le jus de sa création, la fin des années 1960. Et donc nous pouvons dire dans le ton d’Au théâtre ce soir que les costumes sont de Michel Dussarrat, les décors de Jean Hass, de grands artistes. Vous l’aurez compris, ce Canard à l’orange se déguste avec gourmandise.
Marie-Céline Nivière
Le Canard à l’orange de William Douglas Home
Théâtre de Paris
15 rue Blanche
75009 Paris
Jusqu’au 31 décembre 2019
Du mercredi au samedi à 20h30, en matinée les samedis à 17h00 et Les dimanches à 15h30
Durée 1h30 environ
adaptation de Marc-Gilbert Sauvajon
Mise en scène de Nicolas Briançon assisté de Pierre-Alain Leleu
Avec Anne Charrier, Nicolas Briançon, François Vincentelli, Camille Lavabre et Sophie Artur
Décors de Jean Haas assisté de Bastien Forestier
Costumes de Michel Dussarrat assisté d’Aimée Blanc
Perruques et maquillages de Michèle Bernet
Lumières de Franck Brillet
Crédit Photos © Céline Nieswazer