Le Zèbre de Belleville accueille tous les premiers mardis du mois “Le Cabaret de Poussière”, un spectacle pop et populaire qui renoue avec les codes bariolés du genre. A chaque représentation, la troupe propose des numéros inédits sur les rythmes jazzy des trois musiciens : danse, chants, lecture et poésie. En chef d’orchestre de cette joyeuse troupe, le charismatique Martin Dust.
A chaque coup de timbales, il sautille à grands pas. Surnommé Poussière, air du Chapelier fou, il entre sur scène comme un cabri malgré ses compensées gothiques. Un contraste avec son costume trois pièces, qui promet un spectacle hétéroclite et hérissé.
L’introduction du show se fait en chanson : l’hymne du cabaret, doublé par une chorégraphie façon music-hall. Accompagné par ses deux acolytes, Cat Lou – regard Amy Winehouse – et Itzko – regard Cléopâtre -, Martin Dust prévient son public : le Cabaret de Poussière c’est un peu de paillettes et beaucoup de colère. Le contraste toujours : après cette entrée fracassante et joviale, il interprète une de ses chansons sur les SDF du métro.
Ensuite, les artistes – des professionnels du burlesque, rencontrés à droite à gauche – enchainent leur numéro, toujours introduits en rimes par le meneur de jeu. Pour veiller sur eux, accroché aux rideaux en velours rouge, un grand zèbre en bois, l’emblème de cet ancien cinéma de quartier.
Et pourtant, ce Zèbre n’avait pas donné cher à la troupe, passée par des squats à Bastille puis par le bar Madame Louis. En juin dernier, le lieu propose une soirée d’essai aux comédiens. Juste une. Le spectacle complet une semaine à l’avance et l’enthousiasme du public mèneront la direction à programmer le cabaret pour la saison 2018 / 2019. Depuis, les 200 places du lieu sont toujours occupées.
Martin le revendique “Ce cabaret est parisien, populaire, jazzpunk… Comme ta mère : pluridisciplinaire”. Un mélange accueillant dans une ambiance bon enfant. On passe d’un effeuillage des plus sexy (cache-tétons et chaines de diamants sur les hanches) à un numéro de clown des plus repoussants (un playback de l’incontournable “I put a spell on you”, tout en se brossant les dents. Postillons de dentifrice sur le premier rang garantis). Assis sur des chaises de bois, un bar à dispo, le public semble comme à la maison. Il s’esclaffe aux saillis bien senties de Poussière, reste interdit à la récitation d’un poème de Prévert par Bernard Beaufrère, hoche de la tête lors du rap venu de Nanterre de Billie Brelock.
Ne pas se fier à l’ambiance détente du show. En coulisse ça bosse dur car chaque spectacle est unique. Martin compose et écrit lui-même ses chansons. Puis, il faut s’accorder aux instruments d’Amstrong Tebe et Xavier Belin, les deux jazzmen de la troupe, réviser l’enchainement des numéros et surtout ne pas céder à l’impro.
L’autre pépite : les costumes, très vintage, raffinés, exotiques et improbables. C’est un défilé de kimonos pastels, de couvre-chefs en dentelles, de vestes à sequins brodés, de jupons blancs bouffants… Des tenues chinées par chaque artiste ou dégotées par l’une des fidèles du Cabaret, Chanelle de Mai, costumière à l’Opéra de Paris.
Comme l’impression de ressortir une vieille caisse du grenier des grands-parents. Et lorsqu’on souffle sur la poussière qui le recouvre, elle se mouve en particules dorées.
Marie Gicquel
Le Cabaret de Poussière.
Le Zèbre de Belleville, 63 boulevard de Belleville, 75011 Paris . Tous les premiers mardis du mois jusqu’en juin, certaines dates les premiers mercredis du mois. A 20h. Durée : environ 2 heures. 22 euros.
Crédit photos © Gilles Dantzer