Tout n’est qu’ondulations hypnotiques, gestes saccadés et mouvements itératifs. Faisant entrer son corps en résonnance avec les sons, les musiques, les incantations chamaniques, Annamaria Ajmone invite à une balade dans les méandres de ses pensées. Passant d’un univers industriel au cœur d’une jungle peuplée de divers animaux, elle donne aux lieux atypiques où elle se produit des airs d’ailleurs. Envoûtant !
Dans le cadre de la 8e édition des Chantiers d’Europe, initié par Emmanuel Demarcy-Mota, directeur du Théâtre de la Ville, afin de mettre en lumière des artistes européens rares, l‘Institut culturel italien à Paris propose de découvrir le travail de la chorégraphe Annamaria Ajmone. Formée à Milan, considérée par le magazine Danza & Danza comme la meilleure jeune artiste italienne en 2016, elle investit différents lieux, comme la cour du théâtre des abbesses ou les salons très chics de l’Hôtel de Galliffet, qui a appartenu un temps au père d’Eugène Delacroix.
Vêtue de noir, Annamaria Ajmone se tient droite, statique telle une statue, au centre d’un triangle formé par le public. Un bruit de chute d’eau, de tempête, s’élève. Aussitôt rejoint par celui de pales d’hélicoptère. C’est le signal. Alors que la danseuse se penche légèrement en avant, son bras droit se met à tournoyer rapidement. Puis, tout son corps se meut d’ondulations saccadées, de gestes presque robotiques, comme s’il entrait en résonance avec les bruits, les sons qui envahissent l’espace et retentissent sous les ors dorés de cette salle de bal. Puis c’est le silence. Tout s’arrête.
D’autres musiques emplissent les lieux. Allant d’airs chamaniques à des chants d’oiseaux, à des sons d’animaux sauvages, chaque nouvelle sonorité impulse à Annamaria Ajmone de nouveaux mouvements, d’autres gestuelles. Imperceptiblement, elle se déplace et prend possession de l’espace. Se rapprochant des spectateurs, les frôlant, elle entre en communion avec eux avant de s’éloigner, de s’échapper et de finir sa danse à l’extérieur, au loin derrière les grandes fenêtres du salon.
Maîtrisant parfaitement sa ligne chorégraphique, très pure, très fluide, la danseuse envoûte et ensorcelle son auditoire. Évitant toute esbroufe, elle se livre sans fard et signe un solo hypnotique délicat qui invite à un voyage au cœur de l’humain partagé entre civilisation et nature. Un moment de grâce, poétique, dans un monde de brute.
Par Olivier Fregaville-Gratian d’Amore
Trigger d’Annamaria Ajmone
Institut culturel italien à Paris
Théâtre de la Ville
Chantiers d’Europe
50, rue de Varenne
75007 ParisVille
Conception & chorégraphie : Annamaria Ajmone
Musique de Palm Wine
Direction technique : Giulia Pastore