Ce n’est pas tous les jours que l’on plonge dans un thriller qui n’a rien d’angoissant, d’inquiétant. Dans un style direct et gouailleur, David Zaoui nous invite à un étonnant voyage en compagnie d’un tueur à gages dont l’unique credo est de rendre heureuses ses victimes. Un roman noir au cœur de l’âme humaine à contre-pied des velléités égocentriques de notre société occidentale.
Sous le soleil de plomb de l’Andalousie, après un contrat promptement exécuté, Babinsky décide de raccrocher. Physique imposant, visage avenant, il en a fini de son ancienne vie de tueur à gages. Il rêve de liberté, d’un autre monde, d’autre chose. Il faut dire qu’à trente ans, il a déjà vécu mille existences. Abandonné par ses parents à six mois, le jeune Ernest a grandi dans un orphelinat. Garçon sans histoire, il découvre à l’âge de sept ans qu’il a un don très particulier : quelle que soit l’arme, il fait mouche. Respecté de ses congénères, il a la faculté d’apaiser leurs angoisses, de les écouter et de leur donner du baume au cœur.
Très vite repéré pour ses talents par Cyrus le gros, un directeur de stand de tir, un peu mafieux, le jeune Babinsky apprend très vite à manier toutes les armes et à se familiariser avec les diverses méthodes possible et imaginable pour mettre un terme à la vie d’autrui. Alors que sa vie d’assassin semble toute tracée, il se refuse à tuer s’il n’a l’absolue certitude de les avoir rendu heureux une dernière fois. C’est ainsi qu’il devient le premier et unique tueur à gages humaniste, grand amateur de livre et de musique. Mais peut-on passer sa vie à ôter celle des autres ? Peut-on se construire en étant un ange de la mort ?
Avec beaucoup d’empathie et d’humour, David Zaoui nous entraîne dans les pensées troubles et torturées de cet assassin au grand cœur, de cet insomniaque curieux. S’adaptant à son personnage et à son milieu de mafieux, il donne à son récit gouaille et vitalité. Si l’on peut regretter la simplicité de l’intrigue pour un thriller, on se laisse captiver par ce portrait en contre point de notre société consumériste. En jouant des contrastes, il fait de notre tueur à gages, un être plein d’empathie et d’humanité confronté au monde d’aujourd’hui où domine tristesse et violence.
Nostalgique des romans noirs d’antan, le jeune auteur signe une première œuvre sympathique dont les petites imperfections charment et dont le sens du détail laisse présager un bel avenir.
Olivier Frégaville-Gratian d’Amore
Je suis un tueur humaniste de David Zaoui
Editions Paul & Mike
Prix conseillé 16 euros
