Boucles brunes virevoltant autour de son juvénile visage, mains aériennes survolant le clavier de son magnifique piano à queue, Simon Ghraichy donne vie, le temps d’une soirée, à HERITAGES, son dernier album, tout juste sorti en France. Mêlant musique classique et ambiance latino, le jeune virtuose séduit par son interprétation habitée teintée d’espièglerie passionnée. A écouter au plus vite.
Dans une salle pleine à craquer, sous les applaudissements, un fringant jeune homme à la silhouette dégingandée fait son entrée. Veste bleue, pantalon plus sombre, il s’installe au piano. Après quelques secondes de concentration, ses doigts effleurent les touches blanches et noires de son clavier dans un fascinant ballet aérien. Les premières notes s’envolent et résonnent magnifiquement sous les ors du théâtre des Champs-Elysées. Comme dans son troisième album, dont il fête la sortie, Simon Ghraichy ouvre cet unique récital parisien par la Danzón n°2 d’Arturo Marquez. Cet air, d’un des plus célèbres compositeurs mexicains, envoûte totalement l’auditoire. Sa mélodie, simple et légère, prend tout doucement de l’ampleur. Elle gonfle imperceptiblement happant les spectateurs dans un monde lointain avant d’exploser en une myriade de sonorités joyeuses et festives. Emportant les réticences des plus récalcitrants, secouant les préjugés, le jeune virtuose termine ce premier morceau sous les ovations d’un public conquis.
Il en sera ainsi durant tout le concert. Simon Ghraichy ensorcèle littéralement la salle, alternant douceur captivante et rythmique latino endiablée, mêlant avec ingéniosité les classiques européens – troublante et poignante interprétation de la Sonate en si mineur S. 178 de Liszt – aux classiques d’Amérique latine –enivrante version de New York Skyline de Heitor Villa-Lobos. A chaque morceau, le jeune homme fait corps avec la partition qu’il joue de mémoire. Il vit intensément la musique. Elle coule dans ses veines, l’envahit totalement. En symbiose avec les notes qui s’échappent dans les airs, résonnent sous la voûte art déco du théâtre, il touche l’âme, bouleversant.
Mexicain par sa mère, libanais par son père et français par adoption sentimentale, Simon Ghraichy joue avec ses émotions, avec son cœur, avec ses tripes. Après des années sous la férule d’une professeure arménienne sévère, il se libère des carcans sociaux, s’amuse des codes et livre une musique vibrante, joyeuse qui lui ressemble en tout point. Grand enfant, trentenaire jovial, il offre à son public parisien en conclusion de cet époustouflant récital deux surprises de taille, une fabuleuse version avec percussion de la Danzón n°2 d’Arturo Marquez et deux airs d’opéra chantés par l’épatante Mariana Flores.
Pour tous ceux qui n’ont pas eu la chance de voir Simon Ghraichy sur scène, pas de panique, son album HERITAGES est en vente chez tous les bons disquaires et disponibles sur les plateformes d’écoute. Prenez le temps de vous laissez emporter par ce jeune prodige du piano. Captivant !
Propos recueillis par Olivier Frégaville-Gratian d’Amore
HERITAGES de Simon Ghraichy
Deutsche Grammophon
Les photographies qui illustrent l’album sont offertes gracieusement par le talentueux Julien Benhamou.