Anda, Diana de Diana Niepce © Alipio Padilha
© Alipio Padilha

« Anda, Diana » : Requiem pour un corps paralysé

À la Criée, dans le cadre du Festival de Marseille, Diana Niepce, paralysée après un grave accident, invite, à travers un trio sensible et perturbant, à partager son long retour à la danse. 

Deux murs noirs se font face, délimitant un espace scénique totalement nu. Page blanche de tous les possibles, le plateau devient pour la danseuse lisboète Diana Niepce le lieu de sa renaissance. Paralysée après un grave accident, elle ne peut tenir debout qu’à la force d’une volonté acharnée. Dans Anda, Diana, accompagnée des artistes Bartosz Ostrowski et Joãozinho da Costa, elle remonte le fil de son histoire, expose sa fragilité et propose de suivre son long chemin de reconstruction. Poussée par le désir viscéral de danser à nouveau, Diana Niepce, le torse nu et la silhouette gracile, offre sans retenue son corps à ses deux acolytes. 

Physique autant que charnel, féroce autant que délicat, le pas de trois déconcerte et dérange. Refusant d’être une poupée de porcelaine, la danseuse se transforme en poupée de chiffon. Plaquée contre le mur, elle gesticule. Légère, elle se laisse porter bon gré mal gré au rythme d’une bande sonore grondante, envoûtante, quasi christique. Parfois, d’une main ou d’une épaule, elle donne quelques indications. Ici, le silence est d’or, seul le corps a droit de cité. 

L’accompagnant et le violentant parfois, Bartosz Ostrowski et Joãozinho da Costa ne ménagent pas ce corps inerte, bien au contraire : ils le forcent à lutter contre sa propre instabilité. Jambes flageolantes, visage concentré, Diana Niepce lutte de toutes ses forces, se stabilise et se tient droite. Elle ne sourcille pas. Danser, être sur scène, faire de son corps un objet de questionnement des normes, voilà l’important. Le reste est un état de fait.

Gestes brusques, presque érotiques, rappelant le cinéma de Cronenberg, abondant d’une enveloppe charnelle dont elle ne maîtrise plus la tonicité, Anda, Diana oblige à regarder là où nos préjugés refusent de voir. Jouant des ambiguïtés, des tensions nées de l’inconfort des spectateurs, Diana Niepce signe un uppercut performatif. Une claque magistrale !


Anda, Diana de Diana Niepce
spectacle présenté le 20 juin 2024
Festival de Marseille
La criée – Théâtre national de Marseille
30 Quai de Rive Neuve
13007 Marseille
durée 50 min

Direction artistique – Diana Niepce
avec Diana Niepce, Bartosz Ostrowski, Joãozinho da Costa
Soutien dramaturgique – Rui Catalão
Création lumière de Carlos Ramos
Conception sonore de Gonçalo Alegria
Conception des costumes de Silvana Ivaldi

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